Peintre portugais itinérant, Estevão Soares engage dès 1955 une décennie africaine décisive (Angola, Mozambique, Congo belge, Rhodésie du Sud, Afrique du Sud). Réalisée probablement en Angola, cette peinture était pensée pour être montrée en Afrique : Soares y organise en 1960 quatre expositions, s’adressant d’abord à des publics locaux. African Masks en porte la marque — un accrochage en image, quasi « curatorial », où le masque est à la fois objet, sujet et dispositif.
Historiquement, l’œuvre se situe au croisement des modernités de l’après-guerre : débats sur le « primitivisme », migrations de formes entre musées d’ethnographie et galeries, dialogue avec le néo-réalisme et l’abstraction géométrique portugais, en écho aux recherches de Dubuffet, Lam ou Brauner. Sur le plan plastique, le support modeste (carton), la palette resserrée et la sérialité des visages composent une grammaire frontale, entre précision descriptive et geste libre.
Son intérêt majeur tient à son statut de témoignage unique : rarissime vestige d’une production conçue et exposée in situ, elle documente de l’intérieur la circulation des formes et la fabrique des regards au tournant des indépendances. À la fois œuvre et trace d’exposition, African Masks éclaire une modernité portugaise décentrée et la place active des scènes africaines dans l’histoire de l’art du XXe siècle. Une pièce de référence, au carrefour de l’esthétique et de l’histoire.
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