Élégante commode d’époque Régence ouvrant en façade par quatre tiroirs sur trois rangs, estampillée J.-C. Saunier, ébéniste parisien reçu maître le 27 août 1743, actif dans l’atelier familial de la rue du Faubourg-Saint-Antoine.
Sur un bâti en résineux, la façade présente un galbe souple et sinueux caractéristique de la transition stylistique entre la fin du règne de Louis XIV et les premières décennies du XVIIIᵉ siècle, une esthétique encore pleinement en vigueur jusqu’aux années 1750. Les montants antérieurs arrondis sont foncés de deux rangs de cannelures en laiton, les traverses sont ornées d’un canal en laiton, et la traverse basse s’élargit en un tablier animé d’un bronze central : détail décoratif typiquement Régence, que l’on retrouve précisément dans plusieurs modèles attribués ou estampillés Saunier, tels qu’ils sont reproduits et décrits par Pierre Kjellberg.
La commode est entièrement plaquée d’un élégant décor en placage de palissandre, composé de feuilles jointes et de frisages symétriques, selon une recherche graphique propre aux productions parisiennes de la première moitié du XVIIIᵉ siècle.
Les tiroirs, sont de fabrication typiquement parisienne : ils sont débités en noyer, et leurs fonds sont montés en feuillure sur les quatre côtés, technique raffinée attestée sur les meilleurs ouvrages des années 1720–1750.
L’ornementation de bronzes, très complète et d’époque, se compose de six poignées tombantes, trois grandes entrées de serrure, deux petites, d’un tablier et de deux sabots ; les poignées, bien que postérieures, sont toutefois du XVIIIᵉ siècle et ont été remontées anciennement en cohérence parfaite avec le vocabulaire Régence de la commode.
La commode est coiffée de son marbre d’origine, épais, mouluré en bec-de-corbin, parfaitement ajusté au galbe de la façade. Ce marbre a été anciennement brisé puis restauré de façon entièrement invisible.
Par ses dimensions contenues (98 cm de largeur au marbre), cette commode appartient à la typologie recherchée des commodes dites « d’entre-deux » mais courantes que les dimensions standard (120-130cm) destinées à occuper l’espace entre deux ouvertures. Format particulièrement apprécié au XVIIIᵉ siècle, il est aujourd’hui très recherché pour l’aménagement contemporain, offrant un meuble de belle présence tout en conservant une largeur modérée.
L’exemplaire se présente dans un excellent état, avec des restaurations anciennes parfaitement cohérentes pour un meuble de cette époque : -anciennes entures aux quatre pieds, invisibles en extérieur. -remplacement ancien de l’arrière du tiroir du second rang, réalisé dans les règles -traces anciennes de xylophages, la caisse et les tiroirs ayant été traités -restaurations de placage essentiellement localisées en bordure de tiroirs. Ni manques ni soulèvements -Les quatre serrures en fer sont d’époque, en parfait état de fonctionnement, et accompagnées de deux clés.
Notre atelier a procédé récemment au traitement du bois, au démontage, nettoyage et remontage des bronzes, à l’enlèvement d’un vernis ancien trop épais, au polissage et à la reprise du vernis à la gomme-laque incolore. Le nettoyage du dessus et du revers, auparavant englués d’un vernis-colle, a permis de révéler l’estampille J.-C. Saunier sur le montant arrière droit : bien que discrète et partiellement effacée, elle est parfaitement authentique. Sans cette estampille, l’attribution aurait pu être envisagée dans le cercle de plusieurs ébénistes parisiens actifs durant les mêmes années – Schwingens, Marchand, Hédouin – tant ce modèle appartient pleinement au vocabulaire Régence de l’époque.
Cette commode s’inscrit exactement dans la production de Jean-Charles Saunier telle qu’elle est décrite par Pierre Kjellberg (Le mobilier français du XVIIIᵉ siècle, tome II, pp. 782–783), qui souligne l’usage fréquent du palissandre, des cannelures métalliques, des façades galbées à trois rangs de tiroirs, des tabliers développés, ainsi que la qualité du placage en feuilles ou en marqueterie géométrique. Les modèles illustrés par Kjellberg, et notamment la commode Régence plaquée de palissandre (ill. A, p. 783), présentent une parenté stylistique immédiate avec l’exemplaire présent : même vocabulaire structurel, même placage, même articulation des bronzes. Selon Kjellberg, l’estampille de Saunier se rencontre aussi bien sur des commodes de type Régence que sur certaines commodes de maturité, confirmant la continuité de son langage décoratif jusqu’au milieu du XVIIIe siècle.
Bel exemple de mobilier Régence parisien, réunissant format d’entre-deux, estampille, marbre d’origine et décor de palissandre d’une grande élégance, cette commode offre une synthèse remarquable de la qualité et de l’esthétique des meilleures productions parisiennes de la première moitié du XVIIIᵉ siècle.
Dimensions au marbre: Hauteur: 81 cm Largeur: 98 cm Profondeur: 54 cm




































Le Magazine de PROANTIC
TRÉSORS Magazine
Rivista Artiquariato