Cerbère
Pierre peinte en noir
Italie, XVIIᵉ siècle
80 × 69 × 36 cm
Cette impressionnante sculpture représente Cerbère, le féroce gardien des Enfers, assis dans une attitude d’alerte. Sa musculature nerveuse, sa peau tendue laissant deviner les côtes et ses membres puissants confèrent à l’animal une présence saisissante. Peint en noir pour accentuer son aspect menaçant, le monstre déploie deux de ses trois têtes tortillantes, dans un grondement silencieux.
Dans la mythologie grecque, Cerbère est le chien tricéphale des Enfers, fils d’Échidna, créature mi-femme mi-serpent, et de Typhon, divinité malfaisante et personnification des tempêtes. Gardien du royaume d’Hadès, il empêche les morts d’en sortir et les vivants d’y pénétrer.
Dante place Cerbère à l’entrée du troisième cercle de l’Enfer, où sont punis les gourmands, sous une pluie éternelle de grêle et de neige. Le poète décrit le démon aux « yeux rouges » et à la « barbe grasse et noire », image terrifiante de la voracité et de la damnation. L’épisode où Virgile apaise la bête en lui jetant des poignées de terre s’inspire directement de l’Énéide, lorsque Énée, guidé par la Sibylle, endort Cerbère pour descendre aux Enfers.
Terrifiant jusque parmi les morts, Cerbère ne fut dompté que par quelques héros : Hercule, par la force, et Orphée, par la musique. Symbole du mal intérieur et des luttes de l’âme, le monstre incarne les passions obscures que l’homme ne peut vaincre que par le courage héroïque (Héraclès) ou par la puissance spirituelle (Orphée).
Les représentations sculptées de Cerbère sont extrêmement rares. On le rencontre surtout dans les œuvres gréco-romaines (comme l’hydrie de Caere à figures noires, conservée au Louvre) ou dans les créations néoclassiques du XVIIIᵉ siècle, telle la sculpture attribuée à Pajou. Ce Cerbère du XVIIᵉ siècle, à la fois baroque et antique, conjugue la tension dramatique et la monumentalité expressive du mythe revisité