Acrylique sur panneau de bois.
150 x 170 cm
Le sexe est l’une des grandes obsessions de Ben Vautier. La thématique « Ben sex-maniac » est d’ailleurs un fil rouge dans le travail de l’artiste, tant le sexe est à l’origine de tout, de la vie même. L’artiste compose ici son propre cabinet de curiosités érotiques, fait d’objets dévoyés, tournés en dérision par l’appropriation de l’artiste, à l’image de cet austère portrait de femme qui lorgne un phallus qui lui est collé sous le nez. Ou de cette tapette à mouches destinée à fesser le cul de la photographie punaisée juste à côté, tentation qui se passe de mots. Le paravent érotique est un sacré morceau, liant le sexe à l’égo, l’amour à la mort, dans ce jeu de cache-cache sexuel, recto-verso : « l’envie, le désir, le plaisir se cache derrière les paravents ». L’hommage à Félix Faure, ainsi affectueusement intitulé en souvenir des circonstances du décès de cet ancien président français, surimpose à des ébats sexuels bucoliques qui figuraient sur une toile de maison-close, les mots, les phrases de l’artiste, dans un pêle-mêle joyeux et licencieux répondant à celui des corps qui s’ébattent. « Pas d’art sans sexe ». Ben s’amuse encore… du sexisme, du fétichisme, de la fidélité, de la vanité sexuelle, du désir enfin. « C’est la vie ».
Ben Vautier :
Tout est art, surtout la vie
Ben Vautier,
plus connu sous le nom de Ben, est né le 18 juillet 1935 à Naples et
s’est éteint le 5 juin 2024 à Nice. Artiste libre, provocateur et inclassable,
il a fait de sa vie entière une œuvre d’art. Figure majeure de l’avant-garde
française du XXe siècle, il a toujours revendiqué que tout pouvait devenir
art, pour peu qu’on ose le dire, le faire, ou simplement le signer.
Issu d’une
famille d’origine suisse et irlandaise, Ben grandit entre plusieurs pays
méditerranéens — Italie, Turquie, Égypte — avant de s’installer à Nice à la fin
des années 1940. Cette enfance cosmopolite nourrit très tôt ses réflexions sur
l’identité, la langue et la diversité culturelle, qui traverseront toute son
œuvre.
En 1958, il
ouvre à Nice "le Magazin", une boutique où il vend des disques
d’occasion, des objets insolites et ses premières créations artistiques. Ce
lieu devient rapidement un espace d’expérimentation, d’exposition, et de remise
en question permanente du statut de l’art. Ben y développe une pensée
originale, qu’il nommera plus tard l’ego art, centrée sur l’affirmation
de soi comme geste artistique.
Influencé par
Marcel Duchamp, Dada, John Cage et Yves Klein, Ben rejoint dans les années 1960
le mouvement Fluxus, collectif international prônant un art libéré des
conventions, du spectaculaire, et même du "beau". Il multiplie alors
les performances, les happenings, les actions où tout — le mot, le geste, le
silence, l’accident — devient matière à création. Il interroge sans relâche :
Qu’est-ce que
l’art ? Qui décide ? Pourquoi ceci et pas cela ?
Son style
emblématique, ce sont ses écritures en blanc sur fond noir, aphorismes
courts et fulgurants, qui tiennent à la fois de la provocation et de la
philosophie populaire :
« Tout est art
»,
« Je suis un menteur »,
« L’art, c’est de dire que c’est de l’art »,
« Cette phrase est un tableau ».
Ben défend
aussi activement les langues minoritaires, les cultures régionales, et
les idées anti-centralisatrices. Son engagement, parfois controversé, est
toujours animé par une conviction : la pensée critique doit être libre,
vivante, sans peur du jugement.
Ses œuvres
sont exposées dans le monde entier, de la Documenta de Kassel à la Biennale de
Venise, et une grande rétrospective lui est consacrée au Centre Pompidou en
2001. Il reste toute sa vie très attaché à Nice, où sa maison-atelier devient
une œuvre en soi, saturée de mots, de panneaux, de formules peintes sur les
murs, les objets, les meubles.
Jusqu’à sa mort, Ben n’a jamais cessé d’écrire, peindre, signer,
interpeller. Il a ouvert des brèches durables dans le monde de l’art, en
montrant que l’essentiel n’est pas de produire des objets, mais de faire
circuler des idées, de déranger les certitudes, de provoquer la pensée.
Ben laisse une
œuvre dense, libre, radicale, profondément humaine. Il aura transformé le
doute en méthode, la parole en matière, l’existence en art.
Découvrez plus d’œuvres de cet artiste sur le site de la galerie : https://www.galeriepentcheff.fr/fr/peintre-ben-vautier