La folie d’Artois: Une célèbre « folie » néo-palladienne

Autour de 1716, un petit domaine composé de deux pavillons fut attribué à Louis-Paul Bellanger, avocat à la Cour des Aides, par le roi. Il le cède en 1720 au duc d’Estrées, maréchal de France, qui en fit alors cadeau après l’avoir fait transformer et amélioré le bâtiment d’origine.  à son épouse, amie de Louise-Anne de Bourbon, dite Mademoiselle de Charolais, fille naturelle légitimée de Louis XIV et de Mme de Montespan,  les deux femmes utilisèrent le pavillon pour des réunions galantes destinées au Régent, puis au jeune Louis XV. Pour cette raison, le domaine aurait alors été surnommé « Bagatelle ». Ce terme qui désignait au XVIIIème siècle une chose frivole, s’appliquait aussi bien à l’usage qui était fait du pavillon que, par dérision, au prix exorbitant qu’il avait coûté au Duc d’Estrées.

La folie d'Artois, Le château de Bagatelle
La folie d’Artois, Le château de Bagatelle

A sa mort, Bagatelle passe entre plusieurs mains et finalement, le 20 août 1775, Charles-Philippe, comte d’Artois, frère de Louis XVI, et futur roi Charles X, qui acquit l’usufruit de la propriété, afin de disposer d’une retraite tranquille pour recevoir ses conquêtes.

En 1777 cette maison délabrée fut jugée peu digne des fêtes que le comte d’Artois projetait d’y organiser. Sa belle-sœur, la reine Marie -Antoinette, le mit alors au défi de réaliser cette construction en cent jours, soit moins de trois mois, pour le retour de la cour à Fontainebleau. Le pari consistait pour le jeune prince à faire raser l’ ancienne construction du maréchal d’Estrées  et de faire rebâtir, achever et meubler un pavillon de fantaisie, que l’on appelait alors une folie.

La folie d'Artois, Château de Bagatelle
La folie d’Artois, Château de Bagatelle

Le comte d’Artois releva le défi et paria la somme de 100 000 livres. Commencé le 21 septembre 1777 , le chantier, qui employa pendant 64 jours et nuits près de 900 ouvriers et nécessita même la confiscation sur ordre des matériaux passant à proximité, fut achevé à temps pour l’inauguration le 26 novembre 1777 , le prix de la construction de la décoration et du mobilier s’élevant à environ trois millions (Ganay)… et le nouveau château fut alors surnommé « la Folie d’Artois ». Prévue initialement pour la fin 1777, la fête d’inauguration n’eut finalement lieu que le 23 mai 1778 en raison d’un deuil à la cour d’Autriche.

La folie d'Artois, Château de Bagatelle
La folie d’Artois, Château de Bagatelle

Pour relever le défi, Charles-Philippe de France , comte d’Artois fit appel à son architecte attitré, François-Joseph Bélanger, qui conçut à la fois l’architecture du pavillon mais aussi sa décoration intérieure avec l’aide de son beau-frère, le dessinateur Jean-Démosthène Dugourc. Pour pallier la difficulté de trouver rapidement des pierres nécessaires à la construction, il n’hésita pas à donner ordre de réquisitionner tous les convois de matériaux qui arrivaient alors à Paris.

La folie d'Artois, Château de Bagatelle
La folie d’Artois, Château de Bagatelle

 François-Joseph Bélanger, qui fut assisté par l’architecte Jean-François Chalgrin, s’était, en outre, assuré du concours des meilleurs artistes et artisans du temps qu’étaient alors les peintres Hubert Robert et Callet, les ébénistes Riesener, Boulard et Jacob, les bronziers Gouthière et Rémond, le sculpteur-ornemaniste L’Huillier ou encore le marchand-mercier Daguerre.

La folie d'Artois, Château de Bagatelle
La folie d’Artois, Château de Bagatelle

En dépit de la difficulté de l’entreprise, en 35 jours, le gros œuvre était terminé et le pavillon achevé le 26 novembre, soit 64 jours après le pari du prince. La décoration intérieure et l’ameublement ne furent toutefois achevés que plusieurs mois plus tard.

Pagode du jardin du Château de Bagatelle
Pagode du jardin du Château de Bagatelle

Les jardins étaient, quant à eux, l’œuvre du célèbre paysagiste anglais Thomas Blaikie. Inachevés lors de l’inauguration du pavillon, ils consistaient au départ en un parc paysager formé de sous-bois, de pièces d’eau, de pelouses ombragées, de cascades et de grottes dans le goût naturaliste qui prévalait alors outre-manche. Mais ils furent complétés, selon la mode de l’époque, par de nombreuses fabriques et évoluèrent vers ce que l’on appelait alors le style anglo-chinois. Ainsi furent progressivement édifiés le pont de Palladio, le pavillon chinois, le tombeau de Pharaon, l’obélisque, la grotte des philosophes, ou bien encore les ruines néogothiques dites de l’abbaye de Longchamp.

Le comte d’Artois se passionna pour son domaine de Bagatelle qui devint rapidement une de ses villégiatures favorites.

 

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