Très en vogues au XVIIIe siècle dans toute l’Europe, les vues d’optique gravées à l’eau-forte et colorées à l’aquarelle, faisaient pénétrer le spectateur dans un décor – paysages, villes, monuments célèbres, épisodes historiques – révélé en perspective par un ingénieux petit appareil inspiré de la Camera Obscura ; le zograscope, lointain ancêtre de la stéréoscopie et de la 3D….
L’engouement était tel que les monteurs d’optique attiraient un public nombreux, sur les places publiques et les foires, autour de démonstrations scénarisées et mettant en scène des vues perforées aux suprenants effets de jour et de nuit. venez découvrir vous aussi jusqu’au 3 avril 2016, la variété des vues d’optique du musée Paul-Dupuy à Toulouse dans les mêmes conditions que les curieux du XVIIIe siècle, grâce aux zograscopes intégrés dans le parcours de l’exposition. Dépaysement et remontée dans le temps garantis !
Les œuvres ont été sélectionnées parmi les 200 vues d’optique que conserve le Musée Paul-Dupuy, la plupart du XVIIIème siècle. Quelques-unes par ailleurs sont issues d’une collection privée toulousaine.
Qu’est-ce qu’une vue d’optique ?
Il s’agit d’une estampe, généralement à l’eau-forte et colorée au pochoir, représentant un sujet traité avec une perspective très accentuée, un premier plan et un point de fuite situé au centre. La feuille imprimée pouvait être vue à travers deux appareils : le zograscope et la boîte d’optique.
Le zograscope se composait d’une lentille biconvexe montée sur un support coulissant et d’un miroir fixé à 45° à l’arrière. Il suffisait de placer l’appareil sur une table devant la feuille disposée à l’envers : en regardant à travers la lentille, l’image redressée et magnifiée par le miroir apparaissait alors en relief.
La boîte d’optique était une caisse en bois percée d’une ou plusieurs ouvertures garnies de lentilles. Les feuilles étaient présentées:
- soit à l’horizontale, comme pour le zograscope, et l’on regardait les images en relief à travers la lentille, à l’aide du miroir intégré à la boîte (on parle alors de vision catoptrique)
- soit à la verticale pour être montrées avec des effets spéciaux, en particulier de jour et nuit, obtenus grâce à un éclairage à l’avant et à l’arrière de la feuille (on parle alors de vision dioptrique) dont le verso était perforé et agrémenté d’une doublure au papier de couleur.
Que le spectacle commence !
A l’origine, le zograscope est un objet scientifique, utilisé afin d’enseigner aux étudiants les lois de l’optique. Au cours du XVIIIe siècle, la diffusion des avancées techniques et de l’esprit de curiosité en firent un objet de spectacle dans les cabinets de curiosités et les salons des classes sociales aisées. La boîte d’optique est avant tout un objet de foire : transportée à dos d’homme par les colporteurs, elle était un formidable vecteur de diffusion d’images dans les provinces et les campagnes. Les œuvres exposées dans cette salle illustrent leurs différents modes d’utilisation aux XVIIIe et XIXe siècles.
Maux et merveilles
Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, le succès des spectacles de vues d’optique témoigne d’un mouvement d’ouverture et de curiosité de l’ensemble de la société, rendu possible par l’évolution des moyens de diffusion. Les éditeurs européens accordaient une place importante aux sujets d’actualité, souvent dramatiques – guerres, catastrophes naturelles et industrielles, événements politiques -, sans oublier de faire rêver leur public avec l’évocation d’un passé magnifié, telles les grandes compositions consacrées à l’histoire antique et aux Merveilles du monde.
Menus plaisirs
Genre populaire par excellence, le spectacle de vues d’optique était un outil très efficace au service du pouvoir. Les montreurs d’images diffusaient en province une vision heureuse et idyllique de la monarchie : bals masqués, fêtes privées ou officielles, feux d’artifice, mariages royaux étaient l’occasion de fédérer le peuple autour du souverain, mais aussi de diffuser en province les modes de la Cour et de la haute société.
Points de vues, images du monde
La mode des vues d’optique traduit le goût du voyage et de l’exotisme du XVIII e siècle. Les jeunes gens de la haute société de l’époque effectuaient souvent un Grand Tour d’Europe, dont les vues sont le souvenir idéalisé. Les grands sites et monuments italiens, français, anglais et allemands forment le cœur de la collection du musée Paul-Dupuy. Si le graveur se contentait souvent de copier des œuvres existante des monuments européens, il arrivait qu’il se fonde, pour les sujets plus lointains, sur des croquis et des descriptions de voyageurs, voire sur sa seule fantaisie.
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