PORTRAIT D’UN GENTILHOMME EN REDINGOTE
ÉCOLE FRANÇAISE, vers 1790
Aquarelle et gouache, sans verre, cadre en métal
7,2 × 6,2 cm / 2,83 × 2,44 pouces
PROVENANCE
Collection privée, France
À PROPOS DE LA MINIATURE
Cette délicate miniature, probablement peinte vers 1790, représente un jeune gentilhomme vêtu d’une redingote — un vêtement emblématique de l’anglomanie qui séduisait les cercles aristocratiques français dans les dernières décennies de l’Ancien Régime. L’œuvre s’inscrit dans la tradition du portrait français, tout en empruntant à l’iconographie et aux codes vestimentaires venus d’outre-Manche.
Le modèle porte une redingote croisée de couleur brun foncé — un manteau d’origine anglaise adopté puis adapté par l’aristocratie et la bourgeoisie élégante. Le vêtement est ajusté, les revers sont nets, et les boutons haut placés évoquent à la fois une rigueur militaire et un usage sportif. Sous la redingote, on aperçoit un gilet orange vif qui ajoute une touche de couleur, tandis qu’un foulard blanc richement plissé vient adoucir la silhouette structurée.
Particulièrement notable est la coiffure du modèle : ni poudrée ni nouée en catogan, elle est portée au naturel — légèrement ébouriffée, courte et volumineuse sur les côtés. Ce détail marque une rupture avec les perruques poudrées de la génération précédente et reflète les nouveaux idéaux de virilité naturelle et de simplicité britannique.
CONTEXTE : L’ANGLOMANIE ET LA NOUVELLE MASCULINITÉ
Dans les années 1780, la mode française entame une transformation radicale. Sous l’influence du vêtement de sport anglais, l’aristocratie et les élites urbaines délaissent les styles ornés de la cour pour des habits valorisant la fonctionnalité, la retenue et une élégance masculine décontractée. Cette anglomanie dépasse le seul cadre vestimentaire : elle touche aussi le jardinage, les manières, la politique. Mais c’est dans l’habit qu’elle trouve sa forme la plus visible.
La redingote, dérivée du manteau d’équitation anglais, devient alors la pièce maîtresse de la nouvelle silhouette masculine. Coupée haut sous les bras pour favoriser la liberté de mouvement, réalisée en draps de laine épais, elle marie l’utilité à l’élégance. Comme le rappellent les sources contemporaines, ce manteau évolue au début du XIXe siècle vers la queue-de-pie, assurant la transition entre la campagne et la ville, entre la praticité et la mode.
Cette miniature, bien qu’anonyme, témoigne de ce moment charnière. Elle ne saisit pas seulement les traits d’un individu, mais aussi les valeurs d’une génération en quête d’identité moderne à travers la sobriété, la simplicité et le style britannique.