Antoine BERJON (1754 - 1843), Les roses trémières

Huile sur papier, marouflée sur toile. 31,3, x 24 cm. Signée deux fois, à l’encre, sur le côté droit.

Cette nature morte d’Antoine Berjon incarne tout le raffinement et la sensibilité d’un maître du genre. L’œuvre représente un bouquet de roses trémières disposé dans une carafe en verre, posée sur une table de bois sombre.

Les fleurs, aux pétales délicats et soyeux, se déclinent dans une gamme de rouges, de roses et de blancs nuancés, ponctuées de quelques touches jaunes, peut-être une marguerite fanée. Le fond brun, profond et neutre, valorise le motif floral sans distraction, créant une atmosphère de solennité silencieuse.

Berjon excelle dans la restitution des textures : la translucidité du verre, les reflets subtils sur la carafe, la nervure des feuilles, la douceur presque tactile des pétales. Héritée de sa formation de miniaturiste, cette attention au détail confère à l’œuvre une précision scientifique empreinte de poésie.

Une lumière latérale tamisée vient caresser les fleurs, accentuant les volumes et instaurant un subtil jeu de clair-obscur. Les tiges penchées, les feuilles tombantes et les fleurs en déséquilibre apparent animent la composition et rompent avec toute rigidité.Berjon s’inscrit ici dans la tradition des peintres de fleurs du XVIIe siècle, tout en annonçant une sensibilité romantique. L’œuvre célèbre la beauté éphémère du vivant dans une mise en scène sobre et méditative.

Par sa facture élégante et son intensité silencieuse, ce tableau témoigne de la maîtrise technique et de la délicatesse d’observation d'un maître du genre.

Antoine Berjon a grandi dans le quartier de Vaise, à Lyon. Il commence sa carrière en travaillant aux côtés de son père, boucher, avant de se tourner vers des études de médecine. Par la suite, il apprend le dessin auprès du sculpteur Perrache à Lyon. Il exerce également comme dessinandier dans une manufacture de soie, et se lance rapidement dans la peinture. Ses voyages fréquents à Paris pour des affaires lui permettent de rencontrer de nombreux artistes, comme le portraitiste Jean-Baptiste Jacques Augustin avec qui il se lie d’amitié.

La manufacture de soie où il travaille est détruite lors du siège de Lyon (1793), ce qui l'amène à s'installer à Paris, où il vit dans la pauvreté pendant plusieurs années. Après un retour tardif à Lyon, il travaille pour une manufacture de broderie avant d'être nommé professeur de peinture de fleurs à l'École des Beaux-Arts de Lyon, fonction qu'il occupe jusqu'en 1823, année où il est remplacé par Augustin Alexandre Thierriat.

Il a exposé au Salon de Paris à plusieurs reprises, notamment en 1791, 1798, 1799, 1804, 1810, 1817, 1819 et 1842. En 1819, il obtient la médaille d'argent. En 1796, il présente à Paris une gravure réalisée grâce à une technique qu'il a lui-même inventée.