Table en cabaret en acajou, époque Louis XV.

Élégante table dite « en cabaret », en acajou de Saint-Domingue massif, produite dans une ville portuaire française au XVIIIᵉ siècle — très probablement Nantes, dont les ateliers étaient réputés pour leur maîtrise des bois exotiques fraîchement débarqués.

Typologie et usage : la « table en cabaret » selon Rémy-Nicole de Reyniès et Havard
Conformément aux définitions données dans le Vocabulaire typologique du mobilier de Nicole de Reyniès, la table en cabaret est une petite table à plateau creux ou “à cuvette”, utilisée pour le service du thé, du café, du chocolat ou des liqueurs, apparue à la fin du XVIIᵉ siècle (Havard, Dictionnaire de l'ameublement).

Ce type de mobilier naît dans le contexte de la découverte des boissons exotiques (thé, café, chocolat) et de la diffusion d’objets inspirés des modèles orientaux.

Plateau en cuvette creusé dans la masse
Le plateau, exécuté dans une épaisse planche d’acajou de Saint-Domingue, a été creusé et évidé afin de former un rebord périphérique continu, caractéristique de la « cuvette » des tables en cabaret. Cette technique demande une grande habileté : elle apparaît dans les productions des ports atlantiques (Nantes, Bordeaux), où l’on travaillait volontiers l’acajou massif importé des îles.
De légères fissures naturelles, stabilisées anciennement par en dessous, témoignent de l’authenticité du plateau d’origine. Une petite greffe ancienne en bordure est discrète et parfaitement intégrée.

Ceinture chantournée et moulures continues
Les traverses de ceinture présentent un chantournement profond, souligné d’une moulure vive. Particularité remarquable :
la moulure court sans interruption sur les quatre pieds, elle fait entièrement le tour du piètement, ce qui révèle une construction soignée et une volonté d’homogénéité esthétique rarement rencontrée dans les modèles courants.

Pieds galbés, finesse portuaire
Les quatre pieds sont nettement galbés, d’une finesse et d’une élégance typiques des productions nantaises et bordelaises du milieu du XVIIIᵉ siècle. Ils reposent sur de petits sabots bouchons, détails fréquemment observés dans les ateliers de menuiserie portuaire.

Grand tiroir dissimulé
La ceinture ouvre un large tiroir en façade, parfaitement dissimulé, sans bouton ni poignée, préservant la pureté des lignes et mettant en valeur la qualité du bois. Sa construction mêle :
chêne pour les côtés et le fond,
hêtre pour l’arrière.

Un assemblage classique des ateliers nantais, utilisant les bois européens disponibles localement pour les parties secondaires, et réservant l’acajou massif aux éléments visibles.

État et restauration
Le meuble est entièrement d’origine, dans un très bel état de conservation. Nous avons retiré un ancien vernis trop épais et appliqué une finition vernis-ciré, respectueuse de la patine d’origine, apportant éclat et profondeur au grain serré de l’acajou de Saint-Domingue.

Dimensions:
Hauteur: 72,5 cm
Largeur : 85,5 cm
Profondeur: 61 cm