De lourdes silhouettes de branches masquent la lune, tandis que le fleuve silencieux scintille d'argent. C'est une scène évocatrice, une leçon de maître quasi monochrome en peinture nocturne. Tranquillité, solitude, vertus réparatrices de la nature : l'artiste les a trouvées ici.
Né dans la paroisse de Kättilstad, en Östergötland, en Suède, Torna a d'abord suivi une formation commerciale avant de se consacrer à l'art. En 1863, il s'inscrit à l'Académie royale des beaux-arts de Suède à Stockholm et entame une longue période de formation formelle.
Considéré comme l'un de ses élèves les plus prometteurs, ses premières œuvres sont rapidement exposées par l'Académie, qui les accueille avec enthousiasme. Sa « Forêt de chênes à l'approche de l'orage » fut acquise par l'Association artistique de Stockholm.
À ce stade de sa carrière, ses méthodes s'inspiraient des idées de ses professeurs, qui tendaient à être stéréotypées. On lui avait par exemple recommandé d'adopter des compositions agréables, idéalisant le monde naturel plutôt que de le reproduire. L'individualisme était désapprouvé et les maîtres anciens glorifiés. On décourageait également les artistes en herbe de réaliser une œuvre entièrement en extérieur, les études d'après nature n'étant perçues que comme un simple aide-mémoire. Les œuvres achevées étaient généralement réalisées dans les limites d'un atelier.
Malgré son succès initial, Torna était en proie à l'agitation et cherchait à élargir ses horizons par le biais de voyages, d'abord à Düsseldorf, berceau de la peinture de paysage académique. Pourtant, malgré ses richesses, il fut rapidement déçu par le manque d'innovation et s'installa à Paris, ville foisonnante d'idées nouvelles.
C'est là, au cœur des cafés et des ateliers, qu'il découvrit une culture florissante, marquée par l'esprit individuel, poussant ses artistes à exprimer leurs singularités. À Fontainebleau, non loin de là, des peintres comme Charles-François Daubigny et Jules Louis Dupré achevaient leurs œuvres d'instinct, d'après nature. Chevalet sous un bras, jambon et vin sous l'autre, toiles attachées au dos. C'était libérateur, libre et, surtout, authentique.
Torna fut fasciné et entreprit un voyage d'étude de six mois en 1876 avec un groupe d'artistes français pour apprendre les méthodes de travail en plein air. C'était physiquement plus difficile qu'il ne l'avait imaginé, avec en plus la nécessité de transporter tout son matériel, mais le niveau de sa production durant cette période suggère qu'il s'est rapidement adapté.
Il a documenté ses expériences dans « Paysage d'été près de Fontainebleau » (1876), actuellement conservé au Musée national de Suède.
Plus tard la même année, il se rendit dans le pittoresque village de Grez-sur-Loing, près de Fontainebleau, et peignit le long de sa rivière. Accolés à divers endroits à ses rives, des lavoirs en bois sont devenus un point d'intérêt pour de nombreux artistes en visite. Il en a inclus un à droite dans ce nocturne.
Il a réalisé une composition diurne presque identique, intitulée « Paysage fluvial, Grez-sur-Loing », qui a ensuite été acquise par l'académie comme ouvrage de référence pour les étudiants. Ses études en plein air ont rencontré un large succès et il a été exposé à deux reprises au Salon de Paris.
De retour en Suède, il a organisé une exposition personnelle et a continué à faire évoluer ses techniques en s'inspirant de sujets inspirés du riche archipel de Stockholm. Au fil du temps, ses œuvres sont devenues un amalgame de ses principes académiques formels et des attitudes expressives des Français. On pourrait parler de « naturalisme académique ».
Aujourd'hui, il est considéré comme une figure influente de l'évolution des attitudes de l'art suédois de la fin du XIXe siècle. Il est représenté au Musée national, au Riksdagshuset, au musée d'art de Göteborg, à Östergötland, au musée de Malmö, au musée d'art de Norrköping, à l'Académie des Beaux-Arts, au Musée nordique et au musée d'art de l'université de Lund.
Signé/daté et portant l'inscription « Paris ». Encadré plus tard.
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Technique : Huile sur toile
Dimensions hors tout : 82 cm x 63 cm
Année de création : 1878
Provenance : Collection privée, Cologne, Allemagne.
État : Nettoyé. Toile rentoilée. Cadre en excellent état. Prix de vente maximal de l'artiste : 38 500 £ pour « Enfants jouant dans un pré près d'un village (1888) », huile sur toile, Sotheby's, Londres, Peintures, aquarelles et sculptures scandinaves des XIXe et XXe siècles, 2000 (lot 72).
Notre référence : BRV1889