- le bord large est en partie ondulé et en bas à droite avec une marge d'eau, minimes marges de lumière et légères taches
- Reverie -
L'eau-forte montre la femme de Lovis Corinth, Charlotte Berend-Corinth, probablement après la naissance de leur fille commune Wilhelmine, ce à quoi fait référence le décolleté dénudé. C'est là que repose la main avec l'alliance. Le regard est dirigé vers le haut, presque comme dans une rêverie. L'atmosphère qui s'en dégage est celle d'une plénitude détachée, renforcée par le ductus soufflé et pourtant incisif de l'aiguille de la gravure.
Sur l'artiste
Déterminé à devenir artiste, Corinth entra en 1876 à l’Académie des beaux-arts de Königsberg, où il étudia auprès d’Otto Günther, qui lui fit découvrir la peinture en plein air de l’école de Weimar. Sur la recommandation de Günther, Corinth rejoignit en 1880 l’Académie des beaux-arts de Munich. Sous l’influence du cercle de Leibl et de Wilhelm Trübner, il adopta une conception naturaliste de l’art, en opposition à la peinture historique académique. Après une interruption d’un an de ses études pour effectuer un service militaire volontaire, Corinth entreprit en 1883 un voyage d’étude en Italie, puis l’année suivante à Anvers, où il prit des cours auprès de Paul Eugène Gorge. De 1884 à 1887, il séjourna à Paris et se consacra principalement à la peinture de nus à l’Académie Julian, une école privée. Après un passage à Berlin, où il fit la connaissance de Max Klinger, Walter Leistikow et Karl Stauffer-Bern, Corinth vécut de 1891 à 1901 à Munich. Il fut l’un des membres fondateurs de la Sécession munichoise, créée en 1892, aux côtés de Max Liebermann, Otto Eckmann, Thomas Theodor Heine, Hans Olde, Hans Thoma, Wilhelm Trübner, Franz von Stuck et Fritz von Uhde. De cette Sécession naquit le groupe dissident appelé Freie Vereinigung der XXIV ou Les Vingt-Quatre de Munich, auquel Corinth appartenait également. Sous la direction d’Otto Eckmann, Corinth apprit en 1894 l’art de la gravure à l’eau-forte et développa dans la peinture sa technique caractéristique du mouillé sur mouillé, qui donna à ses tableaux un style aux touches en relief. Ses liens avec Berlin se firent de plus en plus étroits. En 1899, lors de la première exposition de la Sécession berlinoise, il fit le portrait de Liebermann, qui réalisa à son tour un portrait de Corinth. Après que la Sécession munichoise eut refusé son tableau Salomé, Corinth s’installa définitivement à Berlin, où l’œuvre fut accueillie avec admiration à l’exposition de la Sécession, ce qui fit de lui — grâce à l’intermédiation de Leistikow — un portraitiste très demandé. En 1903, Corinth ouvrit une école de peinture et épousa en 1904 sa première élève, Charlotte Berend. Sa première exposition personnelle fut organisée par Paul Cassirer. À Berlin, Corinth commença également à s’intéresser au théâtre : il collabora avec Max Reinhardt et créa des décors et des costumes. Après la démission de Max Liebermann, Corinth fut élu président de la Sécession en 1911. La même année, il fut victime d’une attaque cérébrale qui le laissa paralysé d’un côté. Il se consacra alors intensément à l’art graphique et se tourna vers l’illustration de livres. En 1913, Paul Cassirer organisa la première grande rétrospective de son œuvre. Pour son 60e anniversaire, la Sécession berlinoise lui consacra en 1918 une exposition d’envergure. En 1923, à l’occasion de son 65e anniversaire, sa carrière artistique fut couronnée par une grande exposition personnelle à la Galerie nationale. Même après la scission de la Sécession libre de la Sécession berlinoise, Corinth resta fidèle à l’association d’origine. En 1915, il fut de nouveau élu président et, l’année suivante, nommé professeur à l’Académie des arts de Berlin. En 1919, les Corinth achetèrent une maison de retraite au bord du lac de Walchensee, en Bavière, que l’artiste représenta dans plus de 60 tableaux. Lors d’un voyage à Amsterdam sur les traces de ses grands modèles Frans Hals et Rembrandt, Corinth mourut en 1925.