La présente pendule a été réalisée vers 1880–1900, dans le contexte du renouveau des styles du XVIIIe siècle propre à la seconde moitié du XIXe siècle. Sous le Second Empire de Napoléon III, l’impératrice Eugénie encourage en effet un regain d’enthousiasme pour les arts décoratifs de l’époque Louis XVI, qu’elle admire tout particulièrementle-bijoutier-international.com. De nombreux objets d’ameublement de la fin du XIXe reprennent ainsi les motifs et l’esthétique du néo-classicisme. En horlogerie notamment, la période Napoléon III et la Belle Époque voient fleurir des pendules décoratives aux figures allégoriques et mythologiques, conçues dans l’esprit des chefs-d’œuvre du Siècle des Lumièresanticstore.com.
Motifs décoratifs et symboliqueLa pendule représente le dieu de l’Amour, Cupidon (Éros), figuré sous les traits d’un putto ailé en bronze doré. Il est posé sur un nuage et soutient le cadran circulaire, tout en tenant de l’autre main un médaillon orné d’une scène de couple en bas-relieftajan.com. Autour de Cupidon sont disposés divers attributs allégoriques. D’un côté se trouvent un casque à plumet, un bouclier (écu) et un faisceau de licteur, formant un trophée militaire symbolisant la guerre et l’autoritétajan.com. De l’autre côté, on observe les attributs de l’amour triomphant : un carquois rempli de flèches accompagné de son arc, une torche enflammée, ainsi qu’une guirlande de laurier et de rosestajan.com.
On peut y voir l’idée allégorique d’un amour triomphant des conflits (« l’Amour désarme la guerre »), ou plus largement l’union symbolique de l’affection et de la force. Quoi qu’il en soit, cette composition décorative relève surtout du goût éclectique pour l’Antiquité, caractéristique du style Louis XVI tel qu’il fut réinterprété au XIXe siècle.
Technique de fabricationLa réalisation de cette pendule met en œuvre le savoir-faire d’excellence des bronziers français du XIXe siècle. Les parties en bronze ont été fondues (probablement à la cire perdue ou au sable), puis finement ciselées à la main afin de faire ressortir tous les détails (chevelure du putto, ornements du cadran et du socle, etc.). Ensuite, le bronze a été doré au mercure (procédé d’ormolu traditionnel), conférant une dorure riche et inaltérabletajan.com. La dorure d’origine, aux reflets brillants, met en valeur les volumes et contraste avec les parties ombrées de la sculpture.
Le socle est en marbre blanc poli (probablement du marbre de Carrare) et il est orné d’une frise de motifs trilobés et de feuillages stylisés, soulignée par une moulure de perles en bronze doré sur la partie supérieuretajan.com. La base repose sur quatre petits pieds circulaires également en bronze doré, décorés d’une rangée de perles – un détail typique du goût Louis XVItajan.com. Le cadran circulaire est en émail blanc, avec une double graduation comprenant des chiffres romains pour les heures et arabes pour les minutesazurencheres.com. Il est signé « Cheminant, 40 Rue Richelieu » sous le centre, attestant de la provenance. Les aiguilles finement ajourées en laiton doré indiquent les heures et les minutes.
La pendule est dotée d’un mouvement mécanique de type Paris, à remontage par clé, offrant une autonomie d’environ une semaine. Ce mécanisme utilise une suspension à fil (système Brocot courant à l’époque) et comporte une sonnerie sur cloche pour les heures et les demi-heures, conformément aux pratiques horlogères de son tempsazurencheres.com. Le mouvement d’origine, conservé complet avec son balancier et sa clé, est en état de fonctionnement, ce qui ajoute à la valeur patrimoniale de la pièce.
Horloger : Cheminant, 40 Rue Richelieu (Paris)Le cadran porte la signature « Cheminant, 40 Rue Richelieu ». Cheminant était un horloger ou marchand de pendules établi à Paris à cette adresse dans la seconde moitié du XIXe siècledumas.ccsd.cnrs.fr. Une archive de 1857 le mentionne en effet comme « horloger, demeurant à Paris, rue de Richelieu n° 40 »dumas.ccsd.cnrs.fr, preuve de son activité à cette époque.
La rue de Richelieu, située au cœur du 1er arrondissement, près du Palais-Royal, était alors un haut lieu du commerce d’horlogerie et de bronzes d’ameublement de luxe. On y trouvait notamment la maison Galle – Gérard-Jean Galle, fils du célèbre bronzier Claude Galle – qui avait repris l’entreprise familiale au n° 93 de cette même rueosenat.com. La présence de Cheminant au 40 rue de Richelieu l’inscrit dans le réseau de ces fabricants parisiens proposant des pendules haut de gamme inspirées de l’Ancien Régime. Il est probable que Cheminant ait fait réaliser le mouvement par un fabricant spécialisé (Japy Frères, Marti, etc.), tout en assurant la finition, l’assemblage et la vente sous son propre nom. La qualité de cette pendule et la richesse de son décor indiquent qu’il s’adressait à une clientèle aisée, avide de pièces dans le goût Louis XVI, très en vogue à la fin du XIXe siècle.
Modèles similaires et style de l’époqueCette pendule Cheminant s’inscrit dans la lignée des pendules décoratives de style néo-Louis XVI produites au XIXe siècle. Son iconographie à base de putto ailé et de trophées allégoriques s’inspire directement de modèles du XVIIIe siècle. Par exemple, une pendule d’époque Louis XVI (vers 1780) signée Gilles l’Aîné à Paris mettait en scène Cupidon courtisant une figure féminine à l’Antique, le tout sur un socle orné d’une frise d’amoursherbette.fr – témoignant que ces thèmes étaient déjà prisés sous l’Ancien Régime.
Au XIXe siècle, les bronziers ont souvent reproduit et adapté ces pendules à sujets amoureux. Certains exemplaires présentent des variantes : on connaît un modèle vers 1900 où le médaillon figure l’enfant Hercule en lieu et place d’un coupleazurencheres.com. D’autres versions vont jusqu’à arborer sur le cadran la signature d’horlogers illustres du XVIIIe (telle Ferdinand Berthoud), apposée de façon apocryphe afin de renforcer l’illusion d’une origine ancienneazurencheres.com. Une telle démarche de pastiche n’excluait pas une certaine créativité. Ici, le concepteur a combiné un trophée guerrier et des symboles galants – une association peu courante au XVIIIe – reflétant l’éclectisme propre au XIXe siècle, tout en conservant l’esprit du style Louis XVI d’origine (composition symétrique, guirlandes classiques, alliance du bronze doré et du marbre blanc). Cette pendule du XIXe est en somme un hommage aux créations néo-classiques du XVIIIe, réalisé avec le haut niveau d’exécution de son époque.
Dimensions :
Hauteur : 45 cm,
Largeur : 39 cm,
Profondeur : 19 cm