Marie-Béatrice-Anne-Marguerite-Isabelle d'Este naquit le 5 octobre 1658. Fille d'Alphonse IV, duc de Modène et de Reggio (1634-1662), elle fut élevée au Palais des Doges de Modène, en Italie. Fervente catholique, elle avait l'intention d'entrer au couvent. Cependant, en 1673, encouragée par le pape à se marier, elle fut choisie parmi de nombreuses princesses comme la plus apte à épouser Jacques, duc d'York (frère cadet du roi Charles II d'Angleterre), qui monta sur le trône sous les noms de Jacques VII et II en 1685. Marie fut couronnée reine consort dans un somptueux costume de couronnement, portant trois couronnes. Selon le récit de Lord Peterborough lui-même : « Le duc d'York refusait catégoriquement d'épouser une autre princesse qu'une belle ; une belle apparence était une qualité essentielle pour sa future épouse. »
Marie de Modène, elle-même et sa foi, étaient perçues comme un défi à la succession protestante. Indépendamment des difficultés religieuses qui ajoutaient de l'intensité aux débats, le mariage de l'héritier présomptif de la Couronne d'Angleterre déclencha un flot d'intrigues, de spéculations, de traités et de négociations.
Marie et son bébé trouvèrent refuge en France, où elle fut surnommée la « Reine au-delà des eaux » par les Jacobites – les derniers monarques catholiques d'Angleterre –, qui lancèrent plusieurs tentatives infructueuses pour y retourner. Elle résida avec son mari et ses enfants au château de Saint-Germain-en-Laye, une résidence offerte par le roi Louis XIV. Marie jouissait d'une grande popularité auprès des courtisans de Louis ; Jacques, en revanche, était perçu comme ennuyeux. Devenue veuve, Marie passa du temps chez les religieuses du couvent de Chaillot, souvent pendant les mois d'été, aux côtés de sa fille, Louise-Marie-Thérèse. En 1701, après la mort de Jacques II, le jeune Jacques François-Édouard, âgé de 13 ans, fut considéré comme roi par les Jacobites. Trop jeune pour assumer les responsabilités officielles du gouvernement, Marie agit en son nom jusqu'à ses 16 ans. Lorsque Jacques François-Édouard reçut l'ordre de quitter la France dans le cadre du traité d'Utrecht de 1713, qui mit fin à la guerre de Succession d'Espagne (1701-1714), Marie choisit de rester malgré l'absence de famille en France, sa fille ayant succombé à la variole. Chérie par ses contemporains français, Marie mourut en 1718. Considérée comme une « sainte » par ses contemporains, sa dépouille fut inhumée à Chaillot, en France, parmi les religieuses dont elle s'était liée d'amitié.
La famille royale suscitait un vif intérêt du public, comme le font aujourd'hui les célébrités, et l'on s'intéressait vivement à leur vie, y compris à leurs tenues. Leurs portraits étaient très demandés et les studios de l'époque étaient tout à fait disposés à satisfaire cette demande. La duchesse posa pour de nombreux artistes de renom et pour Lely à plusieurs reprises, dont l'atelier peignit plusieurs versions du même tableau. Notre portrait en est un exemple, peint du vivant du modèle, et s'inspire d'un autre portrait du même modèle par Lely, actuellement conservé dans la collection royale du palais de Holyroodhouse (RCIN 403225). Les principales différences résident dans le drapé : dans notre portrait, une main tient des feuilles (au lieu de reposer sur une tête d'agneau) et l'autre un foulard transparent (au lieu d'une riche draperie rouge). Les deux tableaux datent probablement de la fin des années 1670, une période difficile pour la duchesse, durant laquelle elle donna naissance à quatre enfants, dont deux seulement vécurent au-delà de leur premier anniversaire. Il est probable que ces peintures aient été commencées avant 1678, lorsque le duc et la duchesse d'York se rendirent sur le continent, puis en Écosse, pour échapper à la ferveur anticatholique issue du complot papiste de Londres.
Un soin remarquable est apporté au rendu du visage, des bras et des mains, dessinés avec légèreté et dextérité, et constituent un bel exemple de cette époque. Présenté dans un magnifique cadre doré d'époque.
Peter Lely, fils d'un officier néerlandais, naquit en Allemagne à Soest, en Westphalie, en 1618. Il étudia à Haarlem avant de s'installer à Londres en 1641. En 1647, il devint citoyen d'honneur de la Painter-Stainers' Company. Au départ, Lely peignit des paysages, des scènes religieuses et mythologiques, mais il reconnut rapidement la force du marché anglais du portrait et c'est vers ce domaine qu'il se tourna. Employé par le duc de Northumberland, qui avait la garde des enfants royaux, il put étudier la collection Northumberland, composée d'œuvres de Van Dyke et de Dobson. À la fin du Commonwealth, il était devenu le portraitiste le plus célèbre d'Angleterre.
En 1661, il fut nommé peintre principal du roi et, dès lors, il mena une carrière active et fructueuse, peignant les membres les plus influents de la cour et les personnalités importantes. Son atelier était prolifique et employait de nombreux assistants, conformément à la méthode courante. Son succès lui permit ainsi d'établir le style de portrait anglais de base pour des décennies.
Lely était un connaisseur et était connu pour sa propre collection d'œuvres d'art. À la fin de sa vie, il avait réuni l'une des plus belles collections non princières d'Europe, comprenant plus de 25 œuvres majeures de Van Dyke, parmi lesquelles Véronèse, Titien, Claude Lorrain et Rubens, ainsi qu'une fabuleuse collection de dessins. Elle fut vendue après sa mort pour la somme colossale de 26 000 £. Certains objets, acquis par Lely lors de la dispersion des collections d'art de Charles Ier par le Commonwealth, comme la Vénus de Lely, ont été réacquis par la Collection royale.
Dimensions : Hauteur 146 cm, largeur 122 cm (encadré) (hauteur 146 cm, largeur 122 cm (encadré))