Constantin Byzantios
Des figures aux visages pétrifiés, aux corps longilignes et aux gestes arrêtés de mannequins dans des espaces sombres, souvent devant des miroirs : ces personnages énigmatiques étaient depuis les années 1980 les héros muets de Constantin Byzantios, mort à Majorque à l'âge de 83 ans.
Des figures aux visages pétrifiés, aux corps longilignes et aux gestes arrêtés de mannequins dans des espaces sombres, souvent devant des miroirs : ces personnages énigmatiques étaient depuis les années 1980 les héros muets de Constantin Byzantios, mort à Majorque à l'âge de 83 ans.
Ces personnages font songer à certains Chirico et, plus visiblement, au Greco. Cette dernière référence ne pouvait être fortuite. Elève à l'Ecole des beaux-arts d'Athènes, sa ville natale, Byzantios n'a jamais dissimulé l'importance pour lui de son origine grecque et de tout ce qu'elle suppose de références artistiques et culturelles.
A la fin de la seconde guerre mondiale, il vient cependant poursuivre sa formation à Paris grâce à une bourse du gouvernement français. Lié d'amitié avec Alberto Giacometti à partir de 1950, proche de son compatriote Christian Zervos - fondateur de la revue Les Cahiers d'art et de la galerie du même nom et centre du cercle des Grecs de Paris -, il se convainc de l'actualité de la peinture abstraite gestuelle et s'y rallie. Après une première exposition à la galerie Ariel en 1951, il expose ses oeuvres abstraites chez Jeanne Bucher en 1962, avec une préface d'Eugène Ionesco.
Mais il se détache peu après de cette esthétique. En 1965, les travaux qu'il présente chez Christian Zervos annoncent un retour vers la figuration. Il s'accomplit lentement et non sans interrogations. Byzantios abandonne d'abord, pendant six ans, la pratique picturale pour se consacrer entièrement au dessin. Ses figures humaines apparaissent sur le papier noirci à la mine de plomb ou au fusain avant de prendre possession de la toile.
Cette évolution est scandée par des expositions qui sont aussi pour l'artiste l'occasion de célébrer ses amitiés intellectuelles et littéraires, plus étroites que ses liens avec les milieux artistiques. En 1972, Eugène Ionesco et Jean Laude préfacent sa rétrospective au Musée Galliera. En 1974, Michel Foucault introduit son exposition chez Karl Flinker, chez lequel il montre à nouveau des natures mortes, en 1982. En 1990, sa présentation à la galerie Lavignes Bastille, dédiée à ses figures humaines, est préfacée par Jean-Paul Aron, dont il peint le portrait.
En 1994 et 1997, deux rétrospectives lui ont été consacrées, à Metz et à Chalon-sur-Saône. Quand l'histoire de ceux qui, tel Jean Hélion, sont allés à rebours de l'abstraction vers la figuration sera enfin écrite, elle devra faire à l'oeuvre de Byzantios la place dont elle est digne.
Philippe Dagen