Victor-Jean
NICOLLE
(Paris
1754
- Paris
1826)
Soldats
romains dans des architectures antiques
Paire
d’aquarelles
H.
135
mm ;
L. 100
mm
chaque
Signées
dans les architectures
Provenance :
Château de Vinzelles (famille de Lostende) au XXe
siècle au moins.
Victor
Jean Nicolle appartient à cette génération d’artistes voyageurs
dont l’œil sut capter avec précision et sensibilité la beauté
des cités européennes à la charnière des XVIIIᵉ et XIXᵉ
siècles. Élève de l’Académie royale d’architecture, il se
forme d’abord comme dessinateur topographe avant d’orienter sa
pratique vers la peinture et surtout l’aquarelle. Ce double
héritage – rigueur de l’architecte et liberté de l’artiste –
imprègne toute son œuvre, où le détail exact se conjugue avec une
atmosphère subtilement poétique.
Nicolle se distingue
très tôt par son goût pour les vues urbaines et les monuments.
Lauréat du prestigieux Grand Prix de perspective en 1771, il
perfectionne son art du dessin à Paris puis entreprend de longs
séjours en Italie, notamment à Rome, Naples, Florence et Venise.
Entre 1787 et 1789, puis de nouveau de 1806 à 1811, il parcourt
inlassablement la péninsule, carnet et pinceaux à la main. Ses
aquarelles, précises et lumineuses, témoignent de l’engouement
européen pour le « Grand Tour », ce voyage initiatique destiné à
nourrir l’éducation artistique et culturelle.
Ses vues
romaines, florentines ou vénitiennes captivent par leur sens de la
composition : monuments antiques ou Renaissance s’y déploient dans
une perspective claire, mais toujours animés par la présence
discrète de figures humaines, passants, voyageurs ou artisans, qui
confèrent à la scène une vie quotidienne. Nicolle ne se contente
pas de reproduire les architectures ; il sait rendre l’atmosphère
d’un lieu, l’éclat d’un ciel d’été, la transparence d’une
lumière matinale, la résonance d’une place. Son aquarelle se fait
ainsi instrument de mémoire autant que médium esthétique.
De
retour en France, il met le même soin à représenter Paris et ses
environs. Ses vues de la capitale – Notre-Dame, les quais de la
Seine, le Louvre ou la place des Victoires – constituent
aujourd’hui de précieux témoignages de la physionomie urbaine
avant les transformations du XIXᵉ siècle. On lui doit également
des représentations de monuments aujourd’hui disparus ou modifiés,
ce qui confère à son travail une valeur documentaire majeure.
Si
Nicolle connut la reconnaissance de son vivant – ses dessins
circulaient parmi collectionneurs, amateurs éclairés et architectes
– il demeure encore relativement méconnu du grand public.
Pourtant, son œuvre s’inscrit dans la grande tradition des
vedutisti, aux côtés de Canaletto ou Piranèse, tout en affirmant
une sensibilité française, faite d’élégance et de retenue. Ses
aquarelles, d’une remarquable fraîcheur, séduisent par leur
équilibre entre exactitude descriptive et délicatesse
picturale.
Victor Jean Nicolle meurt à Paris en 1826. Ses
carnets et albums, conservés dans divers musées et bibliothèques –
notamment au Louvre, à la Bibliothèque nationale de France et à
l’École des beaux-arts – permettent encore aujourd’hui
d’apprécier l’étendue de son regard et de voyager, par l’image,
dans les villes qu’il a arpentées. À travers son art, Nicolle
nous transmet une vision à la fois fidèle et poétique de l’Europe
urbaine de son temps : un monde saisi à l’aquarelle, fragile mais
d’une intensité lumineuse qui n’a rien perdu de son éclat.
Encadrées au débût du XIXe siècle certainement par l’artiste ou ses marchands, ces deux petites aquarelles typiques de Nicolle se trouvaient au château de Vinzelles sur les hauteurs de Mâcon depuis de nombreuses décennies au moins. Étaient-elles arrivées par succession d’une famille affiliée aux Lostende ou se trouvaient-elles accrochées depuis deux siècles, soit depuis l’achat auprès de l’artiste ? Difficile d’y répondre.