Elle est entièrement plaquée de bois précieux, notamment en bois de rose, raccordé en quatre feuilles, encadré de filets composites alternant bois clairs et bois foncés, à motif de ruban tressé, typiquement néoclassique. Les montants ainsi que les pieds sont ornés de réserves en érable encadrées de filets noirs, évoquant les larges cannelures emblématiques du style Louis XVI.
La façade s’ouvre par deux tiroirs sans traverse, permettant de déployer une remarquable marqueterie centrée sur un trophée musical en bois indigènes et exotiques : sycomore, platane, amandier, houx, amarante... Le décor représente des instruments de musique — cor, tambourin, flûte de Pan — suspendus par un ruban au milieu de rameaux d’olivier.
La commode est richement ornée de bronzes dorés : sabots aux quatre pieds, chutes décoratives à chapiteaux, entrées de serrure à rubans noués, poignées de tirage ornées de rangs de perles.
Elle est coiffée d’un marbre gris Saint-Anne mouluré en quart de rond.
Les proportions, les pieds fuselés à pans coupés, la rigueur de l’assemblage et la composition d’ensemble témoignent d’une parfaite maîtrise des codes de l’époque Louis XVI.
Ce meuble est conçu selon des techniques traditionnelles : montants assemblés à tenons-mortaises, placages posés à la colle chaude. On note l’utilisation exclusive de bois anciens, notamment pour les fonds, où des panneaux de noyer d’ancien mobilier (assemblés à rainures et languettes) ont été réutilisés.
Tous ces éléments techniques et stylistiques, ainsi que la qualité d’exécution, permettent une attribution à André Mailfert (1872–1943), personnage emblématique du monde des arts décoratifs français du début du XXe siècle.
Mailfert était ébéniste, antiquaire, fondateur des Ateliers d’Art du Centre à Orléans. Il se spécialise dans la reproduction de meubles anciens — principalement du XVIIIe siècle — réalisés avec du bois ancien récupéré sur des meubles démontés (notamment des lits à rouleaux ou des armoires du XIXe siècle), qu’il faisait venir par trains entiers jusqu’à Orléans.
Dans son livre Un maquilleur au pays des antiquaires (1935), il décrit avec humour et dérision son métier, ses pratiques et le marché de l’art de son temps. Mailfert assumait pleinement la fabrication de meubles « dans le goût de », tout en dénonçant les marchands qui les revendaient ensuite comme authentiques.
Cette commode peut être rattachée à la première période de production de Mailfert, antérieure à la création de la marque Mailfert & Amos, et se distingue par une grande rigueur d’exécution, une recherche dans les bois et la volonté de rester fidèle aux modèles originaux.
Un meuble élégant, raffiné, révélateur du talent d’un artisan qui savait conjuguer tradition, illusion et humour à l’heure où l’art de vivre à la française était à son apogée.
Dimensions au marbre:
Hauteur: 75,5 cm
Largeur: 73 cm
Profondeur: 43 cm