Toulouse Renaissance

La Renaissance française suscite depuis plusieurs années de passionnantes expositions évoquant son avènement, son épanouissement dans les châteaux et les cercles royaux, ses artistes et ses villes comme ce fut le cas avec Paris, Tours et Lyon. C’est dans cette lignée que l’événement intitulé «Toulouse Renaissance» fait renaître au musée des Augustins, musée des beaux-arts de Toulouse,  l’héritage culturel de la ville.

vitrail de la chapelle Saint-Louis
en la cathédrale Sainte-Marie d’Auch (Gers)

Cette exposition réunit pour la première fois plus de 130 œuvres, sculptures, peintures, incunables, enluminures, objets d’art, tapisseries, mobilier, armes, vitraux et éléments d’architecture, datant de 1490 à 1620, parmi lesquels des chefs-d’œuvre provenant des cathédrales d’Albi et de Rodez, et de collections publiques prestigieuses comme le musée du Louvre à Paris ou le Musée national de la Renaissance à Ecouen. Cette exposition inédite, menée dans le cadre d’un projet universitaire d’envergure, permettra de réévaluer les apports que la ville de Toulouse a apportés au rayonnement de la Renaissance en France.

Sculpture Renaissance. (c)  Musée des Augustins

À Toulouse, ville puissante et opulente, siège d’un immense archevêché, d’un parlement souverain et d’une université réputée, l’essor des arts, qui accompagna le profond élan humaniste de la Renaissance, prit des dimensions symboliques, sociologiques et politiques particulières, en relation avec la prétention séculaire en un passé hors du commun. Capitale d’une province de l’Ancien régime, Toulouse s’est caractérisée toutefois par son éloignement de la cour et par son rôle de foyer artistique majeur. Située au centre d’une région aussi vaste que fertile, elle fut une ville dont ses
voisines dépendaient politiquement, juridiquement et économiquement et où clercs, officiers et bourgeois stimulaient un artisanat de haute qualité.
Les élites s’y formaient, les affaires s’y réglaient et les arts y étaient prospères et recherchés. Privés de ruines, mais n’hésitant pas comparer leur ville à Athènes et Rome, les lettrés, connaisseurs et artistes toulousains cherchèrent l’inspiration dans une antiquité de papier, en se plaçant délibérément sous les auspices de la déesse des arts, la fameuse Palladia Tolosa célébrée par Martial, Ausone ou Sidoine Apollinaire.

LE PARCOURS DE L’EXPOSITION AU MUSÉE DES AUGUSTINS

Section 1 – Une cité riche et puissante

Cette section d’ouverture présente Toulouse au début du XVIe siècle, dans ses composantes sociologiques, économiques et artistiques.
Parmi les œuvres les plus remarquables, on notera dans cette première section les documents associés aux grandes institutions de la ville comme l’unique premier livre des Annales des Capitouls, les registres et reliquaires provenant de la basilique Saint-Sernin, le registre fiscal du Parlement et un tableau néerlandais du XVIe siècle, témoignage ancien de l’attrait de Toulouse pour les artistes provenant de toute l’Europe.

Buste reliquaire de st-lizier-antoine favier 1518-(c) -philippe-poitou-louise-trinquecaste – inventaire-région-occitanie

Section 2 – Au cœur d’une région en effervescence

Replacer Toulouse au cœur du mouvement artistique qui s’exprime avec l’évocation de foyers artistiques périphériques majeurs (Albi, Auch, etc.) pour les années 1510-1530 environ.
Cette deuxième section s’attache à la région, dont Toulouse est le centre rayonnant. Le musée a l’immense privilège de présenter un vitrail de la cathédrale d’Auch, l’un des plus beaux ensembles de la Renaissance française profitant de sa dépose pour restauration. Le foyer albigeois sera représenté par un splendide Ecce Homo et Rodez par un fragment de clôture du chœur de la cathédrale. Des médaillons et sculptures d’ornement permettront d’évoquer les châteaux d’Assier et Bournazel et de replacer le foyer de création toulousain dans son étendue géographique.

Mercure volant-1623-Musée des-augustins-Toulouse
(c) Daniel Martin

Section 3 – L’affirmation d’un goût nouveau à Toulouse jusque vers 1540

C’est la période durant laquelle est mis en valeur le mythe de la Palladia Tolosa dans ses aspects religieux et civiques.
C’est l’affirmation de ce goût nouveau à Toulouse qui permet d’envisager un premier essor de la Renaissance par des œuvres nouvelles et audacieuses comme les Prophètes et les Sibylles de Jean Bauduy provenant de la basilique Saint-Sernin, la magnifique tenture monumentale de la Naissance de saint Jean-Baptiste provenant de la cathédrale Saint-Etienne miraculeusement parvenue à nous dans un état d’intégrité rare et jamais montrée depuis des années, les vestiges des premiers hôtels particuliers ou le développement d’une orfèvrerie prestigieuse avec le buste-reliquaire de Saint-Lizier. L’Epitaphe de Pierre de Saint-André, sculptée à Gênes, permet de toucher du doigt l’influence de l’art italien sur la sculpture locale. L’exposition se déploie également au coeur des collections permanentes du musée dans l’église et le petit cloître.

Un dispositif multimédia immersif permettra aux visiteurs de découvrir et comprendre la typologie de l’architecture Renaissance de Toulouse et ses environs.

Descente de crois-anonyme néerlandais vers 1510. Musée des Augustins-Toulouse (c) Daniel Martin

Section 4 – L’épanouissement classique à Toulouse entre 1530 et 1560 environ

C’est un moment de transition où Toulouse passe d’une Renaissance de motifs érudits à un art en lien avec l’art royal et la littérature artistique. Cette section vise à montrer que « l’invention du classicisme » qui s’affirme alors à Toulouse comme à Paris ou ailleurs dans le royaume n’exclut en rien la « licence ornementale ». Orthodoxie vitruvienne et maniérisme bellifontain sont un même classicisme à cette époque.

Cette section est étroitement liée à la personnalité de Nicolas Bachelier, personnalité mythifiée auquel l’exposition veut rendre une juste place, débarrassée de ses aspects légendaires. La présentation de la série exceptionnelle de sculptures provenant de la Dalbade constitue une occasion unique pour rouvrir le dossier des attributions à cet artiste. De nombreuses restaurations ont été effectuées dans l’optique de l’exposition.

Marcus Antonius Primus entre 1674 et 1677- Musée des Augustins-Toulouse.
(c) Daniel Martin

L’art de la fonte à Toulouse sera aussi à l’honneur avec Dame Tholose et la mise en scène d’une expérience de l’université de Columbia (NY), The making and knowing project : une fonte expérimentale réalisée à partir d’un livre de recettes de fonte toulousain conservé à la BnF. Le portrait peint, le livre imprimé mais aussi l’architecture et l’ingénierie avec des plans et des écrits théoriques ne seront pas en reste.
Des recettes et des secrets à l’expérience : The making and knowing project
Un programme de recherche de l’université Columbia de New-York fait revivre un fascinant manuscrit de recettes techniques datant de la Renaissance.
Le « Projet faire et savoir » rassemble depuis 2014 une équipe d’étudiants, de praticiens (sculpteurs, restaurateurs, etc.), de chercheurs en sciences humaines et de spécialistes en sciences naturelles. Ensemble, ils ont retranscrit et traduit un manuscrit de la fin du XVIe siècle écrit à Toulouse. Puis en laboratoire, ils ont expérimenté les différents procédés minutieusement décrits : moulage, fonte, techniques d’artificier…

Cet écrit anonyme donne un aperçu unique des techniques artisanales et artistiques de son temps, il se distingue par son absence de recettes conventionnelles, sa référence aux expériences de l’auteur, son observation approfondie du comportement animal et ses illustrations.
On perçoit l’intérêt de l’auteur pour l’imitation, par exemple lorsqu’il crée des roses en métal, et l’expérimentation, modifiant un matériau pour qu’il ressemble à un autre, le manipulant pour qu’il adopte des propriétés souvent opposées.
Ce livre de recettes est présenté au musée des Augustins et accompagné de divers objets réalisés selon les techniques de fonte décrites dans le manuscrit.

Section 5 – Troubles, exubérance et concorde, entre 1560 et 1620 environ

Toulouse est au centre des troubles politiques et religieux dans les années 1560-1590. En dépit des conflits, on constate une permanence de la création assortie d’exubérances maniéristes. La section finale illustre la période des troubles religieux qui constitue une phase fort intéressante pour la production artistique en dépit des nombreuses destructions. La fonte poursuit son développement dans le domaine militaire (couleuvrine) et civil (griffoul ou fontaine de Gaillac, copie ancienne du Mercure de Jean de Bologne). L’art des ébénistes parvient à des résultats remarquables comme en témoignent les stalles de Saint-Etienne, appartenant au musée du Louvre et restaurées à l’INP. À la fin de la période, la peinture de chevalet gagne ses lettres de noblesse avec les portraits officiels d’Henri IV et la peinture allégorique d’inspiration maniériste
d’Antoine Boulbène.

En savoir plus:

date: Jusqu’au 24 septembre 2018

Site: https://www.augustins.org

 

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