Singes et dragons, la chine et le japon à Chantilly au 18ème siècle

Assiette à décor kakiémon

Une exposition au musée de Condé du 14 septembre 2011 au 1er Janvier 2012

Au début du XVIIIe siècle, la France se passionne pour l’exotisme ; le goût pour l’Extrême-Orient se développe à la fin du règne de Louis XIV suite aux importations de la Compagnie des Indes.

Le duc de Bourbon, prince de Condé (1692-1740), collectionne les porcelaines, les indiennes et les meubles en laque de Chine et du Japon. Il les fait copier par des artisans français et crée une manufacture de porcelaine tendre dans son château de Chantilly.

Ecritoire en forme de singe , Sèvres

Ecritoire en forme de singe vers 1740
(C) RMN-Grand Palais (Sèvres, Cité de la céramique) / Martine

L’exposition présentera un album exceptionnel du dessinateur Jean-Antoine Fraisse, gravé en taille-douce en 1735, illustré de modèles tirés des porcelaines asiatiques et des indiennes importées d’Extrême-Orient. Les artisans au service du prince s’en inspireront, notamment pour les porcelaines de Chantilly.

Paysage avec aras raunas, cariama huppé, grues, porc-épic, singes macaques. Huet Christophe (1700-1759) (C) RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Hervé Lewandowski
Paysage avec aras raunas, cariama huppé, grues, porc-épic, singes macaques.
Huet Christophe (1700-1759)
(C) RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Hervé Lewandowski

Quand l’art décoratif français s’inspire de l’Extrême-Orient

Dès la fin du règne de Louis XIV, la France développe un goût pour l’exotisme, nourri par les retours de voyage des missionnaires et les importations de la Compagnie des Indes. Porcelaines de Chine et du Japon affluent en masse en Europe. À Chantilly, Louis-Henri, duc de Bourbon, prince de Condé, collectionne les porcelaines, les indiennes et les meubles en laque de Chine et du Japon.

Seau à bouteille, vers 1730-1740 manufacture de Chantilly
Seau à bouteille, vers 1730-1740
manufacture de Chantilly
(C) RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Jean-Gilles Berizzi

Le duc de Bourbon, qui est chef du Conseil de Régence de 1723 à 1726 avant d’être exilé sur ses terres de Chantilly, veut éviter les importations coûteuses et décide de rechercher le secret de la porcelaine de Chine et du Japon. Pour cela, il fait venir à Chantilly un porcelainier nommé Cicaire Cirou, et crée une manufacture de porcelaine tendre à Chantilly entre 1725 et 1735 (cette porcelaine ne contient pas de kaolin, argile blanche dont les gisements en France ne seront découverts que dans la seconde moitié du XVIIIe siècle à Limoges). Le duc de Bourbon fait copier par des artisans français sa collection de porcelaines japonaises dites « kakiemon » du nom d’une famille d’artistes. Parallèlement, le duc de Bourbon crée pour son usage personnel une manufacture de laques et une manufacture d’indiennes, si proches des originaux qu’on ne peut les distinguer, selon les contemporains.

estampe Fraisse Jean-Antoine
Estampes dessinés et gravés en taille-douce, Fraisse Jean-Antoine, 1735
(C) RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Thierry Ollivier

Le peintre en toile Jean-Antoine Fraisse, responsable de la manufacture d’indiennes, copie en 1735 les motifs « kakiemon » des porcelaines et les dessins des indiennes de la collection du duc de Bourbon, et les reproduit en taille-douce, procédé de gravure en creux sur métal, dans son Livre de Desseins chinois, ouvrage in-folio rarissime (13 exemplaires connus, dont seulement 3 enluminés à la main). L’exposition présente deux exemplaires enluminés de cet album exceptionnel du dessinateur Jean-Antoine Fraisse, illustrés de modèles tirés des porcelaines asiatiques et des indiennes importées d’Extrême-Orient ; l’un étant conservé au château de Chantilly et l’autre faisant l’objet d’un prêt exceptionnel de la BnF.

Assiette à décor kakiémon
Assiette à décor kakiémon dit aux « dragons » (vers 1750). Chantilly – musée Condé. © Mélanie DEMARLE

L’exposition propose au public de contempler des exemples aussi variés que significatifs de productions d’art décoratif dérivées, en partie, de motifs gravés par Fraisse : pièces textiles, objets d’art de la table ou simplement décoratif dont un grand nombre de porcelaines tendres produites par la manufacture de Chantilly. Un prêt très important du musée des Arts Décoratifs de Paris et un autre de la Ville de Chantilly permettent de faire le lien entre l’Asie et Chantilly venant ainsi compléter la sélection des objets provenant des collections du musée Condé. De la formidable collection du duc de Bourbon, il ne reste que de trop rares pièces récupérées après la dispersion totale à la Révolution : parmi celles-ci, un cabinet en laque de Chine spécifiquement restauré pour l’occasion et un impressionnant coffre en laque du Japon décoré de faisans.

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