Once upon a time. L’âge d’or de la montre émaillée (1650-1850)

Qu’elles soient bassines, oignons, de gousset ou de ceinture, les montres émaillées des années 1650-1850 sont des chefs-d’œuvre miniatures dont les décors, réalisés avec brio par des artisans de génie, invitent celui qui les admire à un véritable voyage au cœur même des modes et des goûts de l’époque. Avec son exposition Once upon a time (17 mai – 17 septembre 2017), le Musée du Cinquantenaire vous propose de l’accompagner dans cette promenade dans le temps.

Après avoir connu le succès avec ses expositions Sarcophagi et Ukiyo-e, le Musée du Cinquantenaire de Bruxelles poursuit sa politique de mise en lumière de ses fabuleuses collections. L’institution possède dans ses réserves de nombreuses montres anciennes absolument uniques. L’exposition Once upon a time est née du désir de mettre en évidence une facette particulièrement attachante de cet ensemble, à savoir les montres émaillées (1650-1850). Elle met à l’honneur le génie des émailleurs, franco-suisses pour la plupart, qui ont su, par le biais du procédé de l’émaillage, transformer de simples montres en bijoux précieux.

Montre émaillée, La continence de Scipion d’après Pierre de Cortone (Florence, palais Pitti). Mouvement signé Abraham Hornbosfell, maître à Strasbourg, vers 1650-1660.

Une technique périlleuse

La technique de l’émaillage est particulièrement complexe : après avoir tracé un dessin préparatoire sur un support préalablement émaillé en blanc, l’artisan applique, à l’aide d’un liant (huile végétale ou eau), une poudre de verre colorée par des pigments métalliques. L’objet est ensuite passé au four. Sous l’effet de la chaleur, la poudre de verre atteint son point de fusion et se liquéfie. Après refroidissement, on obtient une surface vitrifiée, lisse et brillante. Chaque couleur d’émail atteindra son point de fusion à une température précise, en raison des pigments métalliques qu’elle contient. L’émaillage est un travail périlleux et de longue haleine, ne tolérant aucune imprécision…

Montre émaillée, Judith et Holopherne, d’après l’œuvre de Guido Reni, Boîtier, vers 1650-1660, mouvement fin XVIIIe siècle, remplaçant le mécanisme originel. Cadran signé Frédéric Duval, Paris, vers 1780.

Scènes frivoles, bucoliques et exotiques

Les quelque 175 montres exposées sont abordées par le biais de leur décor, dont l’iconographie est souvent inspirée par les tendances et les mœurs de l’époque mais aussi par les grandes œuvres de la peinture de chevalet. L’exposition est présentée dans cinq salles et divisée en 12 chapitres thématiques. Parmi les sujets approchés, citons les scènes frivoles, les bergerades et les jardins, les voyages et la découverte du monde, l’influence de l’Orient ou encore les Lumières et la Révolution.

Catalogue de l’exposition

Préface

La collection d’instruments de précision des Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles (MRAH) compte près de quatre-cent montres anciennes, datant pour la plupart du XVIe au XIXe siècle. Issues de prestigieuses collections privées (Godtschalck, de Rodes, Vermeersch, …) elles sont venues peu à peu grossir la collection muséale jusqu’à former, à l’heure actuelle, un ensemble absolument unique en son genre.
Dans leur scénographie actuelle, les salles permanentes du musée ne présentent que quelques highlights, la majeure partie de la collection restant précieusement conservée en réserve.

Châtelaine avec montre, signée Julien Le Roy, Paris, vers 1750. Diamants, or et émaux peints.

L’exposition Once upon a time est née du désir de mettre à l’honneur une facette particulièrement attachante de cet ensemble : les montres émaillées (1650-1850).
Au cours des dernières décennies, quelques montres émaillées avaient déjà été présentées lors de rétrospectives consacrées à l’horlogerie ancienne. L’approche était alors essentiellement axée sur les mécanismes de calcul du temps et leur évolution à travers les siècles, les boîtiers orfévrés n’étant guère mis à l’honneur. Pour cette exposition, l’approche se veut résolument différente : les montres exposées sont uniquement abordées par le biais de leur décor émaillé, de son iconographie et de sa signification dans le paysage artistique des années 1650-1850.

Montre « chinoise », Scène bucolique inspirée par la marchande de fleurs de Wheatley (The cries of London). Mouvement signé William Ilbery, boîtier émaillé peut-être par Jean-François Victor Dupont. Londres et Genève, vers 1800. Mouvement en or émaillé, boîtier en or émaillé. MRAH.

Créateurs hors pair, les peintres sur émail ont été pendant longtemps considérés comme des artisans de second ordre, ce qui explique que, si les mécanismes des montres sont souvent signés, les boîtiers émaillés restent pour leur part généralement anonymes. Pourtant, ces compositions picturales sont souvent de véritables trésors de maîtrise technique et d’inventivité. Généralement inspirées par les goûts et les mœurs de leur temps, mais aussi par les grandes œuvres de la peinture de chevalet, interprétées via leurs reproductions gravées, ces minuscules compositions colorées nous offrent un résumé chatoyant de la vie quotidienne, artistique, littéraire et philosophique de leur époque.

Cette exposition entend rendre hommage aux peintres sur émail en replaçant leurs œuvres dans le contexte de leur création via un jeu répété de questions-réponses faisant intervenir non seulement les œuvres qui les ont inspirées, mais aussi différents objets usuels et décoratifs des XVIIIe et XIXe siècles. Plus qu’une simple exposition de montres, il s’agit donc d’un voyage dans le temps, d’un périple littéraire et artistique au cœur même des années 16501850.

Montre en or à décor émaillé d’écailles, David Bouguet (Bouquet), Londres, vers 1635-40. MRAH.

La couleur du temps : boîtiers de montres émaillés 1650-1850
Sophie Balace Conservatrice des collections Arts du métal aux MRAH

Dès l’origine, les boîtiers de montre ont été conçus comme des bijoux précieux, des objets de prestige destinés à être portés bien en évidence, autour du cou ou à la ceinture. Aux XVIe et XVIIe siècles, les décors émaillés étaient très courants en bijouterie ; il n’est donc pas surprenant que l’histoire des premiers boîtiers de montre se confonde tout naturellement avec celle des progrès de l’émaillerie.

Connue depuis l’Antiquité, la technique de l’émaillage consiste à appliquer sur une surface métallique, à l’aide d’un liant (huile minérale ou végétale), une poudre de verre colorée au moyen de pigments métalliques. Une fois soumise à la chaleur du four, la structure cristalline de la poudre de verre se liquéfie. Après refroidissement, elle se solidifie à nouveau, formant une surface vitrifiée, dure et brillante. Chaque couleur d’émail atteignant son point de fusion à une température déterminée, autant de cuissons seront nécessaires qu’il y aura de couleurs différentes.

Montre en or, décor champlevé d’émail translucide rouge et vert sur fond d’émail blanc opaque, Julien Le Roy, Paris,

L’Antiquité et le Haut Moyen Âge avaient uniquement connu les émaux orfévrés, cloisonnés et champlevés, dont la pâte vitrifiée opaque, déposée dans une logette métallique ménagée à cet effet, se caractérisait par une structure cristalline à grains épais. Le perfectionnement des techniques de la verrerie en Europe, dans le courant du XIIIe siècle, avait permis la création d’émaux colorés parfaitement translucides. S’appuyant sur cet incontestable progrès, les orfèvres limousins, à la fin du XVe siècle, mettront au point une technique d’émaillage permettant de poser sur un fond lisse, hors de tout cadre métallique champlevé ou cloisonné, une fine pellicule d’émaux translucides (bleu, vert et mauve) et opaques (blanc et grisé). La peinture sur émail était née.

La servante justifiée, montre émaillée d’après le tableau de Nicolas Lancret, inspiré de la fable de Jean de La Fontaine (New York, Metropolitan Museum of art). Cadran signé Isaac Berger à Copenhague, vers 1750-1770. MRAH,

Outre la relative fragilité de leurs tonalités translucides, translucides, l’inconvénient majeur des émaux limousins résidait essentiellement dans le manque de variété de leur gamme chromatique, limitée à des couleurs froides, et de surcroît assez sombres. Dès le début du XVIIe siècle, plusieurs orfèvres français mèneront, sans doute de manière simultanée, des recherches visant à élargir la palette chromatique des émaux peints. L’histoire a retenu le nom de l’orfèvre Jean Toutin qui, aux alentours de 1630, sur base des acquis de ses prédécesseurs, aurait mis au point une nouvelle technique consistant à appliquer, sur une surface métallique d’or, de cuivre ou d’argent, une première couche d’émail blanc opaque destinée à servir de base à une composition d’émail coloré. Grâce à ce procédé, en appliquant l’émail par petites touches sur le fond blanc uni, selon un procédé technique emprunté à celui des enlumineurs et des peintres miniaturistes, les orfèvres peuvent enfin nuancer les couleurs, les moduler, les combiner et les dégrader.

Montre en forme de boule ailée. Probablement Genève, vers 1805. MRAH.

Les critères de résistance et de brillance propres à l’émail peuvent être conjugués à un potentiel décoratif pratiquement illimité. Capables de traduire avec précision le rendu des étoffes, le velouté des carnations, la luxuriance des paysages et des décors, les émailleurs vont reproduire en miniature les œuvres des grands peintres du moment. L’appellation « peinture sur émail » prend enfin tout son sens : Les boîtiers des garde-temps deviennent les réceptacles d’une véritable pinacothèque en miniature1.
Une fois mise au point, cette nouvelle technique, si prometteuse, se répand rapidement et gagne le milieu des orfèvres blésois qui, dès les années 16301640, se spécialiseront dans la production de boîtiers de montres émaillés. Quelques noms d’artistes ont été conservés mais peu d’émaux sont signés. Difficilement attribuables à un atelier précis, ces derniers se caractérisent généralement par la récurrence des décors fleuris et des thèmes amoureux issus de la mythologie classique.

Pour éviter de voir leurs compositions irrémédiablement endommagées par les dilatations et retraits successifs du support métallique sous l’effet répété de la chaleur, les peintres avaient pris comme habitude d’en émailler à la fois la face et le verso. L’émaillage du revers de la composition principale s’appelle le contre-émail. Cette contrainte purement technique sera bientôt détournée à des fins décoratives ; les revers des couvercles et les intérieurs des boîtiers se couvriront de paysages et de décors secondaires. Les lunettes et les carrures recevant pour leur part un décor luxuriant composé des cartouches historiés et de motifs ornementaux. La montre émaillée était née!
Soumis à des persécutions répétées, des familles entières de Huguenots avaient, dès les premières décennies du XVIIe siècle, pris le chemin de l’exil. En 1685, suite aux dragonnades et à la révocation de l’Édit de Nantes, ce mouvement déjà bien amorcé connaîtra une ampleur sans précédent. Fuyant leur terre natale, de nombreux Français emporteront vers l’étranger leur savoir-faire et leur expertise. Ce sera, entre autres, le cas d’un nombre considérable d’orfèvres, d’horlogers et de peintres émailleurs qui, franchissant en masse les Alpes, gagneront l’Allemagne et la Suisse. Regroupés à Genève, où ils rejoignent de nombreux compatriotes émigrés, ils influeront de manière radicale sur le destin horloger de cette ville.

Objet du paraître par excellence, la montre émaillée, peut-être plus que n’importe quel autre ornement, a toujours constitué un condensé formidable des modes et des mœurs. Les maîtres blésois déjà avaient eu l’idée géniale de reproduire en miniature l’œuvre des grands peintres de leurs temps. Les frères Huaud avaient à leur tour su capter les grandes tendances de la peinture classique. Poursuivant ce mouvement, leurs successeurs vont, eux aussi, amplement puiser leur inspiration non seulement dans l’œuvre des peintres galants (Coypel, Van Loo, Boucher, Lancret, … ) mais également dans le répertoire des peintres de genre et des peintres animaliers. En réalité, les décors émaillés des montres de gousset offrent en miniature une synthèse remarquable des grandes tendances de la peinture de chevalet .

Parallèlement à cette mouvance purement « pictorialiste », d’autres types de décors, directement inspirés par les inclinations et les goûts du moment, seront privilégiés. Une place prédominante sera occupée par l’iconographie amoureuse, déclinée sous toutes ses formes, de la plus candide, avec sa panoplie de Cupidons, d’autels ardents, de chiens fidèles et d’amoureux transis, à la plus prosaïque, l’acte charnel se trouvant habilement suggéré par de subtiles allusions comme les lapins, les luths et les cornemuses.

Si le XVIIIe siècle fut sans aucun doute le siècle du badinage et de l’amour, il est également celui des voyages au long cours, de la découverte de la nature et de ses bienfaits, des classements botaniques et des herbiers. Cette tendance naturaliste débouchera sur la création de décors fleuris, de pastorales, et de marines peuplées d’élégantes frégates .

L’intérêt pour l’Antiquité classique, qui s’était dans un premier temps limité à quelques ornements antiquisants et quelques personnages empruntés à la mythologie gréco-romaine, ira en s’intensifiant. Dès les années 1770, sans doute en réaction aux excès du rococo, cette tendance se doublera d’une propension marquée pour les décors épurés, empreints du nouvel esthétisme néo-classique. Les maîtres émailleurs comme toujours suivent le mouvement et créent d’étonnantes compositions peuplées de déesses et de personnifications allégoriques amplement inspirées de l’œuvre de la peintre Angelika Kauffmann.

Avec le renouveau de l’industrie du luxe, sous le 1er Empire et la Restauration, le marché de la montre émaillée va connaître un second souffle. Les ateliers genevois lancent de nouveaux modèles, susceptibles de plaire à une clientèle féminine en quête de fantaisie et de nouveauté. En forme de coquillages, de fruits et d’instruments de musique, ces délicates montres bijoux présentent généralement un décor fleuri constitué d’une alternance d’émaux translucides et opaques contrastant sur un fond doré. Les couleurs dominantes sont le blanc, le bleu ciel et le noir.

Vers 1820, apparaît un nouveau type de montre émaillée. Les décors figuratifs qui étaient encore en vogue sous le Directoire et le Ier Empire cèdent la place à d’élégantes compositions ornementales d’émail champlevé : fleurs, feuilles et plumes rehaussées colorées se découpent sur un fond d’émail noir. La montre se fait ultraplate. Aux cadrans traditionnels, la clientèle aisée préfère à présent les heures vagabondes émaillées ou niellées sur fond de métal guilloché

La peinture figurative sur émail n’a cependant pas encore dit son dernier mot.
Les sultans ottomans avaient de tout temps fait preuve d’un intérêt marqué pour les garde-temps de fabrication occidentale, ce qui avait eu comme effet d’attirer à Istanbul une communauté d’horlogers européens, établis dans le quartier de Péra. Cet intérêt n’ayant jamais décru, bien au contraire, les horlogers européens vont, dès le milieu du XVIIIe siècle, créer des montres émaillées spécialement adaptées aux goûts de la clientèle orientale, turque, mais aussi perse et indienne. Ce marché lucratif perdurera pendant tout le XIXe siècle, perpétuant en Orient la tradition des montres émaillées alors que les Européens s’en détournaient peu à peu. Les montres ottomanes se caractérisent par des cadrans d’émail blanc inscrits de chiffres turcs (chiffres arabes d’Orient). Les boîtiers, généralement de fabrication suisse, sont ornés d’émaux bariolés représentant des paysages, des vues du Bosphore, des fleurs, des fruits, des trophées de guerre ou de musique. Contrairement aux montres destinées au marché européen, elles disposent souvent d’un double, voire même d’un triple boîtier. Cette particularité peut s’expliquer par le fait que leurs propriétaires, qui étaient souvent de hauts dignitaires impériaux, portaient leur montre à la ceinture, à côté de leurs armes. Il convenait donc de les protéger davantage des chocs occasionnés par cette promiscuité. Il arrivait d’ailleurs assez souvent, lorsque la montre était endommagée, que les émaux intacts soient récupérés pour décorer d’autres objets.

Les ottomans n’étaient pas les seuls Orientaux à apprécier les montres européennes. La Chine avait également développé un intérêt marqué pour les montres émaillées, tant et si bien que des négociants spécialisés dans leur commerce s’étaient établis dans les comptoirs de Macao et de Canton. Le succès des montres émaillées occidentales était tel que des horlogers européens ( James Cox et William Ilbery en Angleterre, et la maison Jaquet, Droz & Leschot en Suisse) avaient développé une production spécifiquement destinée à l’exportation vers le Levant. Si, d’une manière générale, les thématiques prisées par les Chinois ne diffèrent guère de celles que l’on apprécie alors en Europe (reproduction de tableaux célèbres, scènes coquines, paysages, décors fleuris, montres de formes, …), on peut toutefois observer un goût prononcé pour les couleurs vives et acidulées, ainsi que pour les mécanismes fantaisistes, agrémentés de carillons et d’automates. Assez étonnamment, les montres chinoises s’offraient souvent par paire, une bizarrerie que l’on pourrait expliquer par une tradition ancestrale voulant que les présents faits à un supérieur aillent toujours par deux. Cette coutume étrange donna lieu à la création de couples de montres à décor identique mais inversé, créant de cette manière un effet de décor en miroir des plus surprenants.

En Europe, à partir du milieu du XIXe siècle, les montres émaillées continuent à se vendre mais elles peinent quelque peu à renouveler leur répertoire décoratif. Suite à la généralisation de l’usage de la chaîne de montre, reliant le gilet à la poche, la montre ne s’affiche plus de manière ostentatoire. Les critères de solidité et de précision surpassent définitivement l’esthétique. Par ailleurs, suite à l’essor de l’industrialisation, des montres d’usine à moindre coût vont peu à peu inonder le marché. Le goût pour les styles historiques occasionnera toutefois la création de quelques montres et châtelaines émaillées inspirées de modèles plus anciens. Alors qu’en France et à Genève, cette tendance débouchera essentiellement sur la création de montres et de châtelaines néo-rococo, des ateliers autrichiens actifs dans les années 1875-1900 vont se spécialiser dans la confection de montres octogonales de cristal de roche au décor émaillé directement inspirées des modèles primitifs de la fin du XVIe et du début du XVIIe siècle. Ces reproductions, qui étaient commercialisées dans toute l’Europe, n’étaient au départ pas conçues à des fins d’escroquerie. Certains modèles étaient toutefois si réussis que des revendeurs peu scrupuleux tentèrent de les faire passer pour des œuvres anciennes. Quelques détails décoratifs comme les bélières tréflées et la luxuriance inhabituelle du décor émaillé permettent toutefois de ne pas s’y tromper….

En savoir plus:

Musée du Cinquantenaire
Parc du Cinquantenaire 10
1000 Bruxelles
Belgique

www.kmkg-mrah.be

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