L’Atelier en plein air – Les impressionnistes en Normandie

Le Musée Jacquemart-André présente jusqu’au 25 juillet 2016 un ensemble d’une cinquantaine d’œuvres prestigieuses, issues de collections particulières et d’institutions européennes et américaines majeures, qui retrace l’histoire de l’Impressionnisme, de ses peintres précurseurs aux grands maîtres.

Le XIXe siècle voit l’émergence d’un genre pictural nouveau : le paysage en plein air. Cette révolution picturale, née en Angleterre, va se propager sur le continent dès les années 1820 et la Normandie devenir, pendant un siècle, la destination préférée des peintres d’avant-garde. 

Eugène-Louis Boudin, Scène de plage à Trouville, 1869, © Galerie de la Présidence
Eugène-Louis Boudin, Scène de plage à Trouville, 1869,
© Galerie de la Présidence

Pour attirer les artistes, la Normandie dispose de sérieux atouts : la beauté et la diversité de ses paysages ; la richesse de son patrimoine architectural ; la mode des bains de mer qui draine une clientèle fortunée ; la facilité d’accès par bateau ou par diligence, puis par le train ; sa situation à mi-chemin entre Londres et Paris, les deux capitales artistiques de l’époque.

Dès la fin des guerres napoléoniennes, les paysagistes anglais (Turner, Bonington, Cotman…) débarquent en Normandie, avec leurs boîtes d’aquarelle, tandis que les français (Géricault, Delacroix, Isabey…) se rendent à Londres pour découvrir l’école anglaise. De ces échanges naît une école française du paysage, dont Corot et Huet prennent bientôt la tête. À leur suite, c’est une myriade de peintres qui va sillonner la région et inventer une nouvelle esthétique : Delacroix, Riesener, Daubigny, Millet, Jongkind, Isabey, Troyon… 

Gustave Caillebotte, Régates à Trouville, vers 1884 © Photograph Incorporated, Toledo.
Gustave Caillebotte, Régates à Trouville, vers 1884
© Photograph Incorporated, Toledo.

Cette révolution artistique se cristallise, au début des années 1860, lors des rencontres de Saint-Siméon, qui réunissent chaque année à Honfleur et sur la Côte Fleurie tout le gratin de la nouvelle peinture.  Il y a là Boudin, Monet et Jongkind, un trio inséparable, mais aussi tous leurs amis : Courbet, Daubigny, Bazille, Whistler, Cals… Sans compter Baudelaire, le premier à avoir célébré, dès 1859, les « beautés météorologiques » de Boudin. Non loin de là, dans la Normandie bocagère, Degas peint ses premières courses de chevaux au Haras-du-Pin et Berthe Morisot s’initie au paysage, tandis qu’à Cherbourg, Manet révolutionne la peinture de marine. Dès lors, pendant plusieurs décennies, la Normandie va devenir l’atelier en plein air préféré des Impressionnistes. Monet, Degas, Renoir, Pissarro, Boudin, Morisot, Caillebotte, Gonzales, Gauguin… vont y épanouir leur art et le renouveler constamment.

Claude Monet, Étretat. La porte d’Aval, bateaux de pêche sortant du port, Vers 1885, © Musée des Beaux-Arts de Dijon. Photo François Jay
Claude Monet, Étretat. La porte d’Aval, bateaux de pêche sortant du port, Vers 1885,
© Musée des Beaux-Arts de Dijon. Photo François Jay

De multiples raisons expliquent que la Normandie ait été le berceau de l’impressionnisme :

• sa position géographique, à mi chemin entre Londres et Paris, les deux capitales artistiques de l’époque (Courbet, L’Embouchure de la Seine dit aussi Vue prise des hauteurs de Honfleur, Palais des Beaux-Arts, Lille).

• la richesse de son patrimoine architectural, au temps où les artistes participaient activement à sa redécouverte (Corot, Jumièges, Smith College Museum of Art, Northampton) : à partir de 1820, Isidore Taylor publie les Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France, dont les deux premiers volumes sont consacrés à la Normandie, et en 1825 Victor Hugo lance sa Guerre aux démolisseurs.

• la mode des bains de mer, importée d’Angleterre et qui s’implante à Dieppe vers 1820, avant de se propager le long des côtes de la Manche.

• la beauté et la diversité de ses paysages mais aussi la subtilité et la versatilité de ses lumières, à une époque où le paysage devient un genre à part entière et où les peintres sortent de leur atelier pour capter, sur le motif, la lumière naturelle (Monet, La Charrette. Route sous la neige à Honfleur avec la ferme Saint-Siméon, Musée d’Orsay, Paris).

• la facilité de transport par le fleuve puis par le train. Les lignes ferroviaires entre Paris et la côte normande sont parmi les premières à être créées, favorisant l’essor des stations balnéaires.

Auguste Renoir, La Cueillette des moules à Berneval, 1879, © Courtesy National Gallery of Art, Washington.
Auguste Renoir, La Cueillette des moules à Berneval, 1879, © Courtesy National Gallery of Art, Washington.

L’exposition se propose d’évoquer d’abord le rôle décisif joué par la Normandie dans l’émergence du mouvement impressionniste, à travers les échanges franco-anglais, le développement d’une école de la nature et les rencontres de Saint-Siméon. Puis, passant d’une approche historique à une approche géographique, l’exposition montrera à quel point les paysages et plus encore les lumières de la Normandie ont été déterminants dans l’attirance que cette région a exercée sur tous les maîtres de l’Impressionnisme.

En savoir plus:

http://www.musee-jacquemart-andre.com/

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