L’appartement de Jeanne Lanvin

Les visiteurs du musée des Arts décoratifs à Paris peuvent y admirer l’appartement privé de Jeanne Lanvin, sommet de raffinement et précieux témoignage du goût des années 1920.

La couturière Jeanne Lanvin achète en 1920 l’ancien hôtel particulier de la marquise Arconati-Visconti, 16 rue Barbet-de-Jouy à Paris en 1920. Elle décide la construction par l’architecte Bouwens van der Boijen d’une aile de réception  dont les salles (vestibule, bibliothèque, galerie, salle à manger) sont aménagées par le décorateur Armand-Albert Rateau de 1921 à 1924. Aux salles de réception du rez-de-chaussée et du premier étage, succède l’appartement privé situé au deuxième étage, sous les combles. En 1924, la salle de bain est réalisée en premier, la chambre et le boudoir suivront en 1925.

Boudoir de Jeanne Lanvin (c) Arabesques
Boudoir de Jeanne Lanvin
(c) Arabesques

Armand-Albert Rateau met au point dans les années 20 un style tout à fait particulier issu de son intérêt pour l’art antique et le recours à un bestiaire original. Il devient le décorateur attitré de Jeanne Lanvin et réalise, dans le cadre de Lanvin Décoration, le décor intérieur du théâtre Daunou à Paris, avant d’aménager la demeure privée de la couturière. Les trois pièces (salle de bain, chambre et boudoir) de l’appartement privé de Jeanne Lanvin, illustrent un luxe très personnel avec ses meubles en bronze à patine antique, en chêne ou en bois doré.  Dès 1920,

Chambre à coucher de Jeanne Lanvin (c) Musée des arts Décoratifs
Chambre à coucher de Jeanne Lanvin
(c) Musée des arts Décoratifs

La salle de bain Conçue en 1924 réunit tous les éléments de confort, réalisés à l’aide de matériaux précieux et coûteux. Les appareils sanitaires sont en marbre de Hauteville ainsi que les deux vitrines qui flanquent les portes garnies de miroirs. Une partie des murs est en stuc, l’autre est recouverte de plaques de marbre ornées, aux angles, de cornières de bronze sculptées de feuillages et de marguerites. Le sol est dallé de marbre noir, blanc et jaune de Sienne, à dessins losangés et zones unies disposées selon les passages de circulation. La robinetterie de bronze patiné prend la forme de faisans, de marguerites et de pommes de pin. Le mobilier de bronze associe les fleurs et les papillons pour les appliques lumineuses, les faisans pour les lampadaires, le marbre et le bronze pour la table de toilette équipée de porte-serviettes en verre tandis que le siège en bois doré est garni d’une tapisserie au point, passe-temps favori de Jeanne Lanvin.

Salle de bain appartement de Jeanne Lanvin : Baignoire, lampadaire et table de toilette. (c) Musée des Arts décoratifs
Salle de bain de l’ appartement de Jeanne Lanvin : Baignoire, lampadaire et table de toilette.
(c) Musée des Arts décoratifs

La chambre et le boudoir Installée en 1925, la chambre est entièrement revêtue de soie «bleu Lanvin», ce bleu dont Jeanne Lanvin se serait éprise en découvrant les peintres primitifs italiens. La tenture, ornée dans sa partie inférieure de motifs de palmes, rosaces et marguerites, en hommage à sa fille, a été brodée mécaniquement dans les ateliers de la maison de couture avec des fils de coton blanc, orangé et des fils d’argent. Le dessus-de-lit, les rideaux et les cache radiateurs sont réalisés dans le même tissu brodé. La marguerite se retrouve sculptée dans le bois sur la large plinthe à arceaux et sur les entourages cintrés des passages.

Les pièces principales du mobilier en bronze et marbre noir et blanc reprennent le motif des marguerites et les faisans des luminaires de la salle de bain et du boudoir. Ce mobilier est complété par des sièges en chêne vernis et tapisserie au point. Les poignées de porte en bronze doré sont agrémentées de boules pressepapier, objets collectionnés par la couturière. Face à l’alcôve, la chambre s’ouvre sur le boudoir par une grande baie vitrée qui confère au lieu une certaine théâtralité, telle une scène avec ses différents niveaux de profondeur marqués par la glace de séparation.

Salle de bain de Jeanne Lanvin . (c) Musée des Arts Décoratifs
Salle de bain de Jeanne Lanvin .
(c) Musée des Arts Décoratifs

Le boudoir fait le lien entre la terrasse et la chambre, dont il est séparé par la glace claire que des rideaux pouvaient occulter. Les murs sont recouverts de lambris panneautés, peints en gris Trianon, rehaussés de moulures dorées et d’une plinthe haute sculptée d’un motif de vannerie. Des vitrines et une porte vitrée de passage occupent les pans coupés accostés de colonnes engagées dont le corps en marbre de Sienne est surmonté de chapiteaux insolites où deux perruches inséparables sont reproduites en bas-relief et dos à dos.

Les angles de la pièce sont surmontés de quatre basreliefs en stuc peint et doré fixés sur une plaque de verre aventurine. Telles des mosaïques romaines, ils représentent des animaux – faisans, écureuils, belettes, oiseaux de paradis – s’abreuvant à des coupes fleuries. Le sol est recouvert de dalles de marbre blanc et noir, entourées d’une bordure de marbre Portor assortie à la cheminée.

Lors de la démolition de l’hôtel en 1965, le prince Louis de Polignac, cousin par alliance de la fille de Jeanne Lanvin, Marie-Blanche de Polignac, offre au musée des Arts décoratifs l’installation complète de cet appartement comprenant les boiseries et les sols des trois pièces (salle de bain, chambre et boudoir) ,  tel que sa fille l’avait conservé depuis la disparition de sa mère en 1946, ainsi que la plus grande partie des meubles et objets décoratifs.

En savoir plus:

http://www.lesartsdecoratifs.fr/

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